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Trois ruptures

+ d'infos sur le texte de Rémi De Vos
mise en scène Sylvain Martin

: Présentation

Clown triste


En octobre 2014, William Astre et moi-même rencontrons Rémi De Vos chez lui, à Paris. Et tous les trois, nous tombons très vite d'accord sur une chose : derrière l'humour, très présent dans ses pièces – et qui certainement est cause, en partie, de leur succès – se cache un aspect beaucoup sombre, tragique même. Cet aspect, selon moi, structure l'ensemble des pièces de De Vos. Je dirais qu'il peut se traduire en un mot : la solitude. Une solitude même extrême des personnages. La solitude et les dégâts qu'elle engendre, à commencer par le manque de communication, l'enfermement sur soi et le développement d'un individualisme sans limites. Ainsi, les pièces de De Vos seraient comme des sortes de clowns tristes. Elles nous font rire, mais si l'on gratte un peu, on y découvre une grande souffrance. Si Trois ruptures peut (et doit) de prime abord faire rire le spectateur, notre travail doit aussi et surtout consister à faire émerger cette part sombre.


Pièce de chambre


J'envisage Trois ruptures comme une sorte de pièce de chambre. Un petit espace, intime, dans lequel se joue un huis-clos psychologique. Une bataille verbale. Et, dans le même temps, il est intéressant de noter que ces trois « micro-drames comiques » qui composent les trois ruptures, et qui se jouent systématiquement entre l'homme et la femme concernent toujours un tiers. Une chienne, un pompier, un enfant. A partir de ces situations, qui peuvent apparaître comme grotesques, voire caricaturales, c'est en fait un pan entier de la nature humaine qui est mis à jour par De Vos : l'irrémédiable fossé qui existe entre les êtres humains. Nous parlons, et en parlant, nous produisons deux choses : soit nous comblons le fossé, soit nous le creusons. Comme une « pièce de chambre », au sens musical du terme cette fois, nous nous trouvons face à deux instruments qui ne jouent plus la même partition. Et, tout comme deux instruments qui joueraient faux et dont les sons seraient grinçants, les rires des spectateurs doivent être tout aussi grinçants.


Grand-Guignol


Quand je lis Trois ruptures, je ne peux, curieusement, m'empêcher de penser au Grand-Guignol. Dans la pièce de De Vos, nul meurtre et nulle effusion de sang. Mais la question de la violence est bel et bien présente. Il s'agit de la violence ordinaire, de la violence au quotidien. Les textes des pièces relevant de ce genre sont aussi, à plus d'un titre, passionnantes à feuilleter. Les espaces sont clos, l'univers étouffant, la lumière faible. L'ambiance est, en un mot, oppressante. Cette atmosphère m'intéresse tout particulièrement pour Trois ruptures. C'est ainsi que je m'imagine concevoir l'espace du spectacle : un endroit duquel les personnages ne peuvent s'échapper. En un mot, si la violence décrite dans la pièce de Rémi De Vos relève bien de la violence quotidienne, l'univers dans laquelle elle se déploie ne doit pas être quotidien, ni même réaliste. L'espace doit déplacer le spectateur sur un autre terrain : celui, tout simplement, du théâtre, c'est à dire de la représentation, donc du faux-semblant.

Sylvain Martin

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