"Ce triptyque s’organise autour de trois auteurs majeurs. Eschyle, Feydeau, Shakespeare. Il n’y a, je pense, aucune difficulté à imaginer les rapports étroits qu’entretiennent Eschyle et Shakespeare (pensons simplement au couple Oreste/Hamlet, tous deux « tueurs de mère » sur injonction d’un père fautif). Il est évident qu’il est beaucoup plus difficile de comprendre ce que vient faire Feydeau entre nos deux géants – même si l’on peut peut dire que ces tragédies domestiques, ces haines, ces affrontements hommes-femmes sont comme un invariant de tout le théâtre. Je ne défendrai pas l’impossible. J’avais seulement le désir que nos futurs comédiens puissent se confronter à ces trois « langues » – et qu’au milieu en quelque sorte de notre sandwich se trouve un goût inattendu – celui de la perdition. Car jouer Feydeau, c’est comme sauter d’un avion, mais sans parachute. L’autre caractéristique de ce travail, c’est bien sûr la condensation et le fragment. Travail que je pratique maintenant depuis de longues années avec ce que cela comporte d’énigmes, de heurts, d’imaginations, pour remplir les trous – mais aussi de virtuosité et de désir de repousser la logique des récits et la glu de la psychologie. Le fragment, donc, comme explosion de saveurs – perle isolée – message cryptique. Puzzle jamais achevé qui nous laisse sur notre faim."

Georges Lavaudant

novembre 2015