Mai 2009. Au Sri Lanka, la guerre civile entre Cingalais et Tamouls entasse les morts sur les morts. Partout dans l’Inde du sud, des femmes et des hommes disent leur colère, dénoncent un génocide, crient vengeance. Certains vont jusqu’à s’immoler.
Dans ce chaos, comment distinguer un combattant pour la paix d’un terroriste ? La juste colère de la haine ? Comment oser dire que la mort des innocents est la conséquence inévitable d’un éternel affrontement entre le bien et le mal ? Comment seulement prétendre faire du théâtre quand les frères meurent, quand les soeurs sont violées ? - un comédien s'irrite, les bras lourdement désarmés, écrasé d'horreur et du sentiment que tout est vain.

J’ai parlé alors de mon expérience de comédien au Théâtre du Soleil lors de la création du Dernier Caravansérail, l’odyssée contemporaine des réfugiés, la suite désastreuses et logique d’une guerre qui jette des milliers de personnes sur les routes, à la recherche d’une terre d’accueil.

Quartier libre, méditation. Chacun chez soi. Je suis parti à Karikal, ma ville natale, où a vécu la plus grande des poétesses tamoules, Pounidavadi, la première à avoir tressé une guirlande de têtes de morts destinée au cou du dieu de la destruction, Shiva.
Elle m’a inspiré pour tresser à mon tour une guirlande de mots et d’images destinée aux corps des morts abandonnés sur les champs de bataille. Pour que leurs âmes puissent traverser les mondes.
Terre de cendres, c'est le lieu d'accueil des paroles de tous défunts : tueurs, tués, complices, lâches, profiteurs, héros, résistants.