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Sur la route

Antoine Rigot ( Conception )


: Entretien avec Antoine Rigot

réalisée par Cathy Bouvard, codirectrice des Subsistances - août 2009

Après Le fil sous la neige, vous allez créer Sur la route…. Cette pièce s’inscrit dans une série de spectacles autobiographiques ?


J’ai commencé à écrire ces spectacles parce qu’ils s’imposaient. Cette obligation de vie qui m’est tombée dessus a été difficile à accepter et il fallait que j’en fasse quelque chose. C’était au tout début, j’étais au centre de rééducation, je ne bougeais pas encore. Quand je suis sorti, c’était trop difficile pour moi d’affronter mon histoire seul en scène et c’est comme ça qu’est né Le fil sous la neige. Cette seconde pièce sera beaucoup plus intime, mais encore partagée. J’imagine aussi un solo, mais je veux me laisser le temps.


Pouvez-vous expliquer ce cheminement ?


Le fil sous la neige est un spectacle de partage d’une passion, je l’introduis et le conclu, les fildeféristes le traversent, il est une manière de continuer mon histoire de funambule. C’est une grande aventure de respect et de confiance où les interprètes, au-delà de leur magnifique technique, apportent leur imaginaire et leur sensibilité au service d’une proposition. Cela m’a permis de continuer à creuser l’art du fil et à commencer mon travail de reconstruction personnelle. Dans cette seconde pièce, nous tentons d’aborder ce qui m’a donné la force de redémarrer : ce soutien de tous les instants, cette attention, cette aide très directe qui m’a été accordée. On arrive à l’essentiel, au rapport à l’autre et à rendre sensible que même s’il y a une altération physique importante on peut continuer à exister, à aider, à soutenir l’autre. Forcément ça renvoie à un propos politique, malgré une tragédie quelle qu’elle soit, on devrait toujours être accueilli, avoir sa place. Cette pièce impose aussi de regarder une réalité dont on a tendance, instinctivement, à se détourner, le handicap.


Le point de départ était OEdipe sur la route d’Henry Bauchau, quel rôle a ce livre dans ton spectacle ?


On y revient, on en repart. Il n’y a pas de rapport direct avec l’histoire, mais les personnages, leur parcours, leur voyage, résonnent très fortement en moi. Dans le roman, il est question de reconstruction après une tragédie. Depuis des années ce roman m’accompagne et des liens se tissent entre l’errance d’OEdipe et ma propre histoire. Et il y a Antigone qui s’impose dans ce voyage, son engagement, son attention, sa force, sa manière de réagir, de donner une énergie : une aura que je retrouve chez Agathe et certaines personnes qui m’entourent. Le livre est une source d’inspiration qui permet aussi de prendre une distance avec ma propre histoire.


Avec votre corps vous inventez une autre manière d’être sur scène ?


Après neuf ans, j’y crois toujours mais je sais qu’il n’y aura pas de révolution. Les années de rééducation m’ont demandé tellement d’efforts pour un résultat si minime et pourtant je ne peux pas arrêter car si j’ai progressé si doucement, je régresse bien plus vite. Mon corps est tel qu’il est et il faut déjà que je trouve l’énergie de me mettre debout tous les jours. Petit à petit j’ai commencé à l’accepter, réappris à l’aimer, à découvrir ses possibilités, et appris une nouvelle forme d’équilibre, un nouveau langage physique. C’est aussi une progression psychologique, tout cela devient un challenge fou mais il y a une très grande satisfaction à ne pas s’être laissé abattre.


C’est une aventure très personnelle ?


Oui, mais je ne suis pas livré à moi-même, Agathe ma compagne, pour qui la vie a aussi basculé le jour de mon accident, est la première Antigone, nous cherchons ensemble le chemin pour surmonter notre drame et continuer à vivre… Il y a aussi toute une équipe qui m’accompagne dans mon travail ! J’écris le spectacle avec Cécile mon assistante et Sanja ma partenaire, nos sensibilités s’accordent avec une belle précision et ces complicités sont très importantes. L’équilibre existe aussi dans la manière de ressentir physiquement les choses, Sanja comprend comment peut fonctionner mon corps et nos échanges nous permettent d’atteindre une fusion qui je pense, parle au-delà de bien des mots.

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