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Rien ne va plus

mise en scène Mathieu Bauer

Rien ne va plus, ce titre à lui seul pourrait résumer l’esprit de ce spectacle, faisant directement référence à cette petite phrase du croupier pour suspendre les paris sur une table de roulette. Moment où les esprits se figent, guettent avec appréhension le numéro fatidique qui va sortir.
Premier coup, le 4, pour les quatre comédiens. Couples, croupiers, crooner…
Deuxième coup, le 4 pour quatre musiciens.
Gain net, 10 fois la mise, pour les dix protagonistes embarqués sur le plateau, transformé pour l’occasion en salle de jeu.
Un casino à la place d’un théâtre. Une idée de Charles Pasqua ? Non, mais quoi de plus excitant que de faire évoluer des acteurs et le public dans une salle de jeu, sorte de cour des miracles moderne, univers clos, hors temps, hors champs maintes fois décrit et fantasmé dans la littérature et le cinéma.
Voilà le point de départ d’un spectacle qui s’articulera autour de ce casino matérial. Il s’agit de construire le spectacle sur trois axes distincts : montage d’oeuvres littéraires et cinématographiques, un film autour de Las Vegas, une partition musicale, le tout marchant, comme à son habitude chez Sentimental Bourreau, de front, dans un jeu de va et vient constant. La littérature est féconde sur le sujet : oeuvres romanesques, essais, journalisme, de Fédor Dostoïevski à Stephan Zweig, de Georges Bataille à Nick Tosches, de Hunter S. Thompson à David Goodis, autant de genres qui se sont attardés sur les personnages et les questions inhérentes à la pratique du jeu (passion, destruction,
folie, hasard, futilité…).
Le cinéma n’est pas en reste, du muet Foolish Woman de Von Stroheim au décapant Casino de Martin Scorcese, une pléthore de films existe sur le sujet avec son lot de personnages types : joueurs, croupiers, tricheurs, femmes fatales, gangsters et mafioso… qui seront convoqués sur le plateau.
On dit toujours qu’il est facile de faire le portrait d’un individu en observant sa façon de jouer. Nos joueurs seront-ils timides, flambeurs, arrogants, mesquins, romantiques, désespéré(e)s, mélancoliques, lunatiques ? (...)
Faire le parallèle entre le jeu, l’art et le théâtre en particulier, l’économie et la notion d’utilité. On est en droit de s’interroger sur l’utilité et de la futilité de jouer au casino ou de faire du théâtre. De dilapider de l’argent et de l’énergie dans les deux cas. En même temps, “le plaisir, qu’il s’agisse d’art ou de jeu, est réduit à un rôle qui serait subsidiaire dans les représentations individuelles qui ont cours”.
On peut leur opposer des notions de productivité, de rentabilité, chères à nos contemporains. Alors peut-être, faire un spectacle sur le jeu et le casino devient subversif ou tout au moins introduit de belles contradictions.


Mathieu Bauer


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