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Poignard

+ d'infos sur le texte de Roberto Alvim

: Note d'intention

De quoi ça parle ?


Les personnages de cette pièce appartiennent à une génération dépolitisée, prise au piège d’une société où les valeurs de compétitivité et de hiérarchie sociale sont sans cesse mises en avant. Alors qu’ils pensent se servir des symboles du système pour le frapper au coeur, ils n’en sont que les instruments. L’un des personnages manipule ses complices en échange d’une promesse de célébrité : la signature d’un disque à Miami... Cette situation illustre un vrai problème : comment faire la révolution sans être récupéré ?
Cette génération dont nous parlons est la nôtre. Ses doutes, sa confusion sont les nôtres. Pourquoi et avec qui s’engager ? Quelle lutte est juste, laquelle est vaine ? Sommes-nous condamnés à vivre dans une société où il faut poignarder l’autre pour se faire une place ?
Dans la pièce, les membres de la cellule révolutionnaire choisissent comme cibles des icônes du showbusiness parce qu’elles sont à leurs yeux les symboles d’une société corrompue et d’une population manipulée. Juste ou pas, peut-on faire la révolution pour les autres ?
D’un côté, un Teen-movie déjanté, de l’autre, véritable thriller politique. Et le lien entre les deux, l’industrie du spectacle : la télévision vide de sens, qui dresse le portrait d’une société parfaite, aseptisée, consensuelle, et d’un modèle de réussite superficiel et inattei- gnable. Une censure et un nivellement par le bas diffusé en continu. Le nouvel « opium du peuple ».
Nous souhaitons que la pièce soit brutale comme un électrochoc, ce que l’on ressent déjà à la lecture. Elle interroge avec humour et lucidité notre incapacité à faire confiance, notre paresse intellectuelle, notre lassitude, une dangereuse forme de désespoir.


Comment s’y frayer un chemin ?


La pièce est construite comme une boucle, un retour sur des événements passés dont la clef n’est donnée qu’au dernier tiers de la pièce, et nous progressons dans l’intrigue autant grâce aux témoignages des personnages que par l’action proprement dite. Nous sommes dans un entre-deux, un temps présent qui se vit comme tel mais qui se raconte déjà au passé.
Les comédiens-narrateurs peuvent donc à la fois être présents dans la scène qu’il jouent et exister dans un futur proche, comme par exemple lors de l’échange Olavo/Goofy.
Nous traduirons ces “scissions temporelles”, ces glissement de temps au plateau de la manière suivante : la scène se fige d’un côté pour quelques instant (ici, celui de la cellule révolutionnaire), puis “la vie” reprend des deux côtés du plateau.
L’histoire du poignard se raconte par allers-retours, de narration en action, d’une temporalité à une autre. De nombreux flashbacks accentuent l’aspect cinématographique, presque thriller, de la pièce.


Musiques et Lumières


La pièce n’appelle pas à une mise en scène réaliste : si le jeu des comédiens peut refléter un certain naturalisme, la construction et déconstruction des espaces, la rapidité des changements et la construction chronologique évoquée plus haut demandent quelques conventions théâtrâles que le spectateur doit accepter.
Musiques et lumières deviennent donc complémentaires, créent les espaces et les différentes ambiances et participent ensemble, notamment, à une mise à distance critique de l’univers des médias.
En opposition à la lumière artificielle des plateaux télés, “les scènes de vies” seront éclairées de manière naturelle, et diffuse, afin de souligner le contraste entre une vision du monde aseptisée et la réalité d’une société.
La musique reprend les codes de l’audiovisuel, les amplifie et les détourne.
En se jouant des codes établis, nous révélons le propos de la pièce.


Qu’est-ce qu’on verra ?


L’auteur nous emmène dans la cellule révolutionnaire club Mickey : point névralgique de l’histoire. Autour de cette cellule, des endroits aussi différents que : un bureau de ministre, un parc, un plateau de télé, un restaurant, un zénith, une rue, un hôpital.
De Larry Clark a Gregg Araki en passant par Banksy, une plongée dans l’univers de la politique, des médias et des arcanes du pouvoir.


Nous voici plongés au coeur d’« une comédie » grinçante, mais aussi dans « un conte de fée », qui se déploit en séquences s’enchainant dans un rythme effréné, à l’image de notre société où tout doit s’obtenir facilement et rapidement, et où tout file dans une dynamique frénétique. Des tags viennent souvent ponctuer la scène empêchant tout possible mise en scène réaliste. « Tu perds toujours » ou encore « Il faut que ça change » sont tout autant des moyens d’interrompre le continuum de la fable, et permettent, dans un effet distanciatif, d’apporter un regard critique sur la scène en train de se faire et donc sur notre société contemporaine.

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