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Quand je pense qu'on va vieillir ensemble


: Entretien avec Jean-Christohe Meurisse

Alors voici le nouvel opus choral des Chiens de Navarre ?


Cette pièce sera sans doute un peu différente des précédentes. Dans une première partie nous emploierons notre langage habituel, celui du groupe, ou du travail « en meute »… c’est notre marque de fabrique, notre moyen de mettre en oeuvre le théâtre. Mais la seconde partie sera plus éclatée, moins collective, il y aura des scènes à deux ou trois qui modifient l’espace.
Notre base scénographique est toujours la même : une boîte noire, des chaises, une certaine stabilité. Je cherchais autre chose que la boîte noire pour ce spectacle, c’est de là qu’est née l’idée de la terre au sol qui est dans « les danseurs»… J’avais envie d’un endroit instable, à l’origine dévasté, brûlé, abandonné. J’avais en mémoire des photos de la ville de Détroit aux États-Unis qui montre une ville abandonnée, terriblement mélancolique. Puis m’est venu le titre de l’oeuvre de Stig Dagerman.


Les Chiens de Navarre font oeuvre littéraire, drôle de surprise…


Non, pas tant que ça, nous travaillons toujours à partir d’une oeuvre invisible. Nous avons toujours une source d’inspiration, un sentiment qui naît d’une oeuvre, une sorte de base de travail que nous faisons disparaître. La Raclette est née du livre de l’intranquillité de Pessoa… Je sais, cela semble très éloigné. Là nous sommes partis du titre du livre de Dagerman Notre besoin de consolation est impossible à rassasier. Mais pour la première fois j’avais envie que la source apparaisse. Je me demande si celui qui connait l’oeuvre de Stig Dagerman peut regarder avec une autre approche la pièce. Mon envie pour ce spectacle est de toucher à la mélancolie de chacun, à notre manière. La pièce est en quelque sorte un mini-guide pour faire face lorsqu’on a besoin de se faire aider.


Dans les spectacles précédents, le travail des Chiens portait plutôt un regard acerbe sur les conduites collectives, dans cette création c’est à l’individu de passer à la moulinette ?


Oui, notre travail s’est toujours beaucoup attaqué au groupe, sur le mode jubilatoire, là il s’empare de l’individu. L’idée de départ ce sont ces groupes de paroles qui cherchent à soutenir l’individu lorsqu’il a atteint son point zéro. C’est un spectacle qui appelle à aider l’autre. C’est grotesque ou moqueur mais jamais méchant… nous ne sommes pas méchants. C’est une sorte d’observation de ceux qui voudraient qu’on les guide et de ceux qui les guident. Arrivé au point zéro, il faut réapprendre à structurer son langage : être désirable, dire bonjour. Cela donne des scènes drôles et bêtes, voire terribles et effrayantes. Lorsque l’un des comédiens est guidé par deux autres, deux autres personnages prennent le pouvoir sur un autre. C’est un peu apocalyptique et en même temps c’est sans jugement : nous nous sommes tous retrouvés dans ce genre de situation à essayer d’aider, maladroits ou violents. Je demande aux acteurs de composer le moins possible : chacun tour à tour est cobaye, coach, spectateur. Cela met en jeu la capacité de résistance de chacun, ses pulsions d’humiliations, ses modes de relations. Nous n’avons aucun jugement sur ce dont on parle… C’est juste le constat que malgré toutes les bonnes volontés jamais personne ne pourra nous sauver… Mais peut-être que l’on va finir par une vraie note d’espoir… ça aussi ça changerait !

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