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Quai ouest

mise en scène Philippe Baronnet

: Présentation

RESUME


Homme d’affaires ruiné, Maurice Koch se rend en Jaguar, avec sa secrétaire, sur les quais d’une ville portuaire pour se donner la mort… Mais dans un hangar voisin, qu’il lui faut traverser, vit une famille d’immigrés : père à demi détruit par la guerre, mère vampirique, venue d’un pays lointain qu’elle évoque avec nostalgie, et leurs enfants : Charles, qui n’a qu’un rêve, traverser le fleuve et trouver un emploi, et puis Claire, la plus jeune, que son frère n’hésite pas à marchander… Comme déposés là aussi, Fak, petit dragon redoutable de vingt-deux ans qui saute de combine en combine, et un homme sans paroles, Abad, le Noir, immobile et inquiétant… Heurt de deux mondes : « De l’autre côté là-bas, c’est le haut, ici, c’est le bas, le plus haut qu’on montera, de toute façon, on ne sera jamais que le haut du bas. » Et cet homme qui vient ici mourir, suscitant haine et envie, et qui, comme chacun d’eux, à sa façon, voudrait être ailleurs ! Tous sont devant un mur d’obscurité, et la présence de Koch relance la dynamique des transactions : droit de vivre, droit de mourir, dans le hangar tout se monnaie : « Ce sont des scènes d’échange et de trafic ; il n’y a pas de tendresse dans le commerce. » Question de survie. Colonialisme, violence sociale, exclusion, immigration, arrogance de l’argent : Koltès crée le choc révélateur du « ballottement de l’homme par l’histoire. »


NOTE D’INTENTION


Echanger, manigancer, bluffer, faire chanter : le deal, sujet majeur de Koltès, est une matière inépuisable pour mettre en jeu les acteurs, incarner des situations ambiguës et raconter la violence du monde. Au centre de toute relation humaine : le commerce – ici, on vend sa sœur contre les clés d’une voiture... Alors, avec l’épaisseur des personnages, le mystère du lieu et la présence d’une arme, on croit plonger immédiatement dans un drame. Et puis on réalise qu’on fait fausse route : Quai ouest n'est ni complètement tragique, ni tout à fait sérieuse. La pièce a à voir avec un désespoir radical qui pour l’auteur n’est pas incompatible avec une certaine forme d’humour ! Dans ce hangar apparemment déserté et à l'écart du monde, Koltès confronte des gens qui n’auraient jamais dû se rencontrer. Le choc est brutal certes, la misère palpable, les personnages irréconciliables, mais leurs échanges nocturnes sont aussi inquiétants qu’incongrus, parfois aussi drôles que tragiques. Jouant avec l’urgence et le détour, l’étrange et le familier, le grotesque et le sublime, la pièce chemine et trouve une force peu commune dans cette indétermination. Il en va de même pour les personnages : cachant en permanence leurs véritables motivations, ils n’ont jamais l’air de penser ce qu’ils disent ni d’agir pour ce qu’ils désirent vraiment. Absolument inclassable, construite sur une intrigue très sophistiquée, Quai ouest est une pièce expérimentale, qui navigue librement d’un genre à l'autre. Shakespeare, Conrad ou encore Jarmusch, Koltès joue de nombreuses références, souvent cinématographiques, mais toujours au service d’une langue singulière, éminemment théâtrale, qui déploie une poésie et une rhétorique insensées et qui, trente ans plus tard, résonne encore de manière inouïe.

Philippe Baronnet

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