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Promenades

+ d'infos sur le texte de Noëlle Renaude
mise en scène Marie Rémond

: Propos de l'auteur

… « La promenade est une activité sociale inscrite dans la chose publique, celle du jour férié, du dimanche, en est un exemple parfait, c’est le jour vide, le jour où on se promène, le jour où on y a droit, on s’y sent convenable et consensuel, on circule sans avoir rien à faire comme tout le monde et on n’en conçoit aucun remords. Elle a cependant, la promenade, si on la sort de son contexte autorisé, un autre visage, d’une stupéfiante incorrection, celui de la fauteuse de trouble, de la perturbatrice d’ordre, insupportable aux actifs, disons aux travailleurs. Mettez un promeneur dans le champ d’activité d’une foule qui vaque et vous verrez que la nonchalance du lambin à vélo, le relâchement du traînard à pied, la lenteur de l’escargot en auto, font de manière irréparable désordre dans le tableau. Ces empêcheurs de courir tout droit, qui imposent sans s’en douter un contre-courant anarchique et mollasson au sein des flux à la besogne, redoublent illico la fureur du citadin qui bosse, du paysan qui trime et de l’automobiliste qui trace. Problème ou bonheur, c’est selon, de non concordance de temps habités, incorrection propre à la grammaire qui offre au langage son bancal, son râpeux, ses non coïncidences et lui ôte par là ses habits du dimanche.


Il serait à ce propos, intéressant de savoir exactement quand est apparue, chez les premiers hommes, l’idée de promenade, inséparable de son corrélat, le loisir. On imagine l’homme tout juste séparé de son état d’animal, occupé principalement, tout comme l’animal encore, à sa survie et à sa reproduction. Il y a bien eu un jour pourtant où l’un d’eux est sorti flâner aux environs de son gîte sans avoir le souci ni de la chasse ni de la cueillette pour le simple plaisir de traînasser sans but dans les herbes folles, de se dégourdir les membres inférieurs, de jouir avant d’aller dormir des derniers rayons du couchant dans le silence de la préhistoire, dont on peut se faire quand même, même dans le vacarme d’aujourd’hui, une petite idée. »


Noëlle Renaude, extraits du Journal de Théâtre Ouvert N° 23

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