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Place des Héros

+ d'infos sur le texte de Thomas Bernhard traduit par Claude Porcell
mise en scène Arthur Nauzyciel

: Résumé

Ah! vieux peuple, tu restes seul de tant d'empires écroulés ; tu as vu les Ethéens de Karkemisch, ceux de Enyouk et de Bog-haz-keni, et de Kadisch, et leurs palais gisent dans la poussière de la Cappadoce déserte, leurs palais ornés de sphinx et de lions et d'aigles à deux têtes. Tu as vu Ninive et l'Assyrie et l'Egypte et Darius et Cyrus et Alexandre ; et tout cela est mort, et toi tu vis. Bernard Lazare, Le Fumier de Job.



15 mars 1938. De la place des Héros (ou Heldenplatz) s’élèvent les clameurs des Autrichiens venus accueillir Hitler au lendemain de l’Anschluss. Mais cinquante ans plus tard, ces cris, Madame Schuster les entend encore lors de crises douloureuses qui la condamnent à vivre loin de Vienne. Après un premier exil de 10 ans à Oxford, son mari, le professeur Schuster décide de revenir à Vienne, « pour l’amour de la musique ». Mais toutes ces années, leur vie est rendue invivable à cause des crises de Madame Schuster. Il accepte donc de retourner à nouveau à Oxford. Quelques jours avant leur départ, Joseph Schuster, professeur d’université juif viennois se jette par la fenêtre de leur appartement donnant sur la place des Héros. C’est par la voix de ses proches, celle de Madame Zittel, sa fidèle gouvernante qui comptait pour lui plus que sa femme, celle de ses enfants méprisés et celle de son frère bien aimé, que se dessine le portrait du professeur Schuster, un homme tyrannique, raffiné et révolté. C’est aujourd’hui son enterrement.


« Je n’aurais pas découvert cette pièce sans Marcel Bozonnet qui me propose de la créer à la Comédie-Française, Salle Richelieu, ce qui marque enfin l’inscription au répertoire d’une œuvre de Thomas Bernhard. Au-delà du tollé historique qui a suivi la création à Vienne en 1988, on découvre une pièce obsédante, faite de ressassements, de mystère, de rages et d’amours mêlées. Dépassés par une douleur archaïque, envahis par les mots, habités par les morts, les membres d’une famille sans lieu, sans place, jamais, tentent de recoller les morceaux du choc avec la grande histoire. Thomas Bernhard, que l’on a tant taxé de polémiste scandaleux propose en fait, pour accepter de vivre dans un monde en lambeaux qu’il semble exécrer, la force du rêve, de la musique, et donc de l’art. Thomas Bernhard démonte le monde, il construit une pièce. « Il aime les belles choses ; son logis est d'une dignité aristocratique. Mais cette dignité, quand il s’y déplace, est aussi toute naturelle, d'une grande clarté», disait de lui l’acteur Bernhard Minetti. Condamné par la médecine à 15 ans, et soigné toute sa vie par son demi-frère, il puise dans cette lutte contre la maladie une force de vie incroyable, que l’on retrouve dans son écriture. Thomas Bernhard est mort le même jour que son grand-père, qui l’avait initié à l’art et à la vie. À sa demande, il a été enterré dans un simple cercueil de bois blanc, « comme un juif orthodoxe ». Objet de fascination, construction admirable, qui témoigne d’un amour immense pour le théâtre et les acteurs, cette pièce de fantômes ou de morts-vivants est aussi une œuvre testamentaire à bout de souffle, « le malade imaginaire » d’un artiste à la fois poète, romancier, peintre et musicien. »

Arthur Nauzyciel

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