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Pinocchio

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mise en scène Joël Pommerat

: “Changer les mots de l’oeuvre”

par Joël Pommerat

Je considère tous les éléments concrets sur la scène (la parole fait partie de ces éléments concrets) comme les mots du poème théâtral.


En fait, entre un auteur comme je le suis devenu et un metteur en scène, c’est juste une question de développement du geste.


Si un metteur en scène a déjà écrit une dizaine de fois «sur une pièce» sans changer un seul mot de l’oeuvre (ce qui est selon moi déjà une façon de réécrire la pièce), il finira peut-être, tout naturellement, par avoir envie de réécrire la pièce plus encore, en allant même jusqu’à changer les mots de l’oeuvre, franchir ce mur du respect de l’oeuvre que je trouve suspect, parfois morbide. Je vois le travail du metteur en scène moderne comme un palimpseste. Réécrivant sur le manuscrit, le parchemin de l’auteur. Après avoir réécrit le sens à travers sa mise en scène sans en changer un mot, le metteur en scène commence un jour, et c’est normal, à avoir envie, comme moi je l’ai eu, de réécrire en grattant le manuscrit, en réécrivant par-dessus, ce qui est la définition exacte du palimpseste.


C’est ce processus proche de celui de la mise en scène moderne qui m’amène par exemple à ne pas monter Les Trois Soeurs de Tchekhov mais finalement à réécrire sur le parchemin des Trois Soeurs, comme dans ma pièce Au monde.


Je suis un metteur en scène qui a poussé un peu plus loin le geste de la mise en scène. Ce processus était inévitable et je ne crois pas qu’il ne concerne que moi. Je pense qu’il va produire l’éclosion d’un grand nombre d’auteurs d’aujourd’hui, pleins de leur histoire de théâtre et concernés par leur présent.


C’est aussi une conception de l’écriture qui considère que nous sommes profondément liés aux autres, ceux qui nous ont précédés, qu’ils existent à travers nous. Nous ne créons pas à partir de rien, il n’y a pas de vide à l’intérieur de l’humain, il n’y a pas de vide à l’intérieur de la culture humaine.


Extrait de Théâtres en présence, Actes Sud-Papiers, collection Apprendre, Arles 2007, pp. 22-24

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