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Pacamambo

+ d'infos sur le texte de Wajdi Mouawad
mise en scène Nicolas Fleury

: Propos de l'auteur

Extrait de ''A la découverte de cent et une pièces'' - Editions Théâtrales

« Il existe, entre l’adulte qui écrit et l’enfant qu’il a déjà été, une intimité aveugle qui les place tous deux dans un dialogue étrange et magnifique. L’enfant dit à l’adulte :
« Raconte l’irracontable. Raconte ce que je raconte de tout temps : la peur, l’amour, et la mort. Parle-moi avec ma voix d’adulte, pleure-moi avec mes larmes d’adulte, et écris, écris, toi qui sais écrire les moments où je m’éveille au milieu de la nuit et que je me retrouve seul, dans le coeur du silence, au plus profond de l’obscurité, à être animé par la peur de voir apparaître, devant moi, tous les démons de l’enfer. »
Voilà ce que dit, à chaque mot, l’enfant en l’adulte qui écrit. Et l’auteur, celui-là qui est penché au dessus de son cahier, inscrit les mots de son enfance sur les pages blanches de sa peine. Car il faut avoir une peine immense pour pouvoir écrire aux enfants. Les enfants ne comprennent que ceux qui ont de la peine. L’oiseau aux ailes brisées, l’escargot perdu au milieu de la tempête, la mésange affolée, la souris écrasée, le chat perdu, le chien blessé. Les enfants, le plus vite possible, trouvent autour d’eux quelque chose à aimer, et aussitôt, au fond d’eux-mêmes, ils se savent en route pour vivre une douleur terrible puisque cette chose aimée bientôt ne sera plus. La perte. Mais il faut aimer ardemment. Serrer entre leurs bras leur peluche, ou leur animal, comme ils voudraient eux aussi, être serrés. Déjà ils se font auteur. Déjà ils se racontent des histoires.
L’auteur qui écrit tente de faire lumière sur ce qui était évident et lumineux à l’âge de l’enfance. Et la mort était, pour l’écrivain, une chose lumineuse.
J’écris non pas pour parler de la mort, mais pour aimer la mort.
Je crois qu’il faut montrer des tragédies aux enfants. Je crois que la vie est davantage tragique que dramatique. Or, ce qu’ils voient sur l’écran de leur télévision et ce qu’ils voient souvent au théâtre, ce sont des drames. Ce qui veut dire qu’ils ne sont que très rarement mis en présence du sentiment tragique de la vie. Or, pour ne pas être totalement démuni lorsque celui-ci surgira dans leur existence – à la mort du fils ou de la mère, à la perte de l’amour -, l’art a le devoir de leur faire ressentir le sentiment tragique pour que, déjà, ils apprennent à dialoguer avec lui.
Écrire pour la mort afin que l’enfant qui vit au fond de l’auteur puisse faire le ménage de l’enfance et permettre à l’adulte de devenir plus humain. »

Wajdi Mouawad

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