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Occupe-toi de Feydeau

+ d'infos sur le texte de David Lewis traduit par John Thomas
mise en scène Adrian Brine

: Présentation

  • Marianne Chaque fois qu’on se dispute, tu notes.
  • Feydeau Absurde.
  • Marianne Tu me payeras des droits d’auteur.
  • Feydeau Ma chérie, c’est exactement ce que je fais depuis que

nous sommes mariés.


  • Occupe-toi de Feydeau



La pièce


Premier acte. Dans son bureau, Georges Feydeau tente de terminer une pièce sur les déboires conjugaux ; il est interrompu par Yvette la bonne, et par sa femme rentrée inopinément ; par sa maîtresse ensuite, une aspirante comédienne cachée dans la chambre à coucher. Suivent un ami, amant de cette dernière, le mari qui voudrait se lancer dans le music-hall avec des imitations de cris d’animaux qui mettent en émoi la petite bonne. Deuxième acte. Où l’on retrouve à l’Hôtel Terminus tous ceux qui voulaient s’éviter. Troisième acte. Un auteur dramatique d’aujourd’hui écrit une farce sur Feydeau, tandis que sombre son mariage.


Une effervescence à laquelle s’ajoutent : un singe prénommé De Sade, une cascade de pantalons, une clé et des billets de rendez-vous à ceux qui doivent les ignorer.


Avec Occupe-toi de Feydeau, David Lewis s’en donne à coeur joie et signe un authentique vaudeville. En prise avec l’écriture de sa dernière pièce, débordé par son entourage et à la manière de ses personnages, Feydeau arrange, dupe, dissimule et panique, pris malgré lui dans une valse de péripéties saugrenues. Étonnant de voir à quel point fiction et réalité se confondent ! Voilà qui assurément inspire un auteur d’aujourd’hui, pour qui la farce offre la plus franche des vertus théâtrales : le rire.




Ma vie est une farce ! Georges Feydeau


Georges Feydeau. « C’était un ravissant enfant », notent dans leur journal les Goncourt qui fréquentaient le père, écrivain connu dans les années 1860, et la mère, éblouissante beauté polonaise. Ils élevèrent Georges dans un anti-conformisme absolu. Son milieu familial cultivé et bohème n’aime l’argent que pour le luxe qu’il procure et le plaisir de le dépenser ; il est à l’antipode de Labiche, fils d’un petit industriel du sucre. À 21 ans, il n’a aucun mal à placer ses premières comédies qui très vite, dès Tailleur pour dames, connaissent le succès. Très beau, joueur, fumeur, charmant, un peu froid, distant, habitué aux conquêtes et aux coups de foudre décisifs, ce séducteur se laissa épouser sans arriver à se ranger. Vers 18 heures, on le rencontrait au Café napolitain avec d’autres fines lames, Alphonse Allais, Courteline, Tristan Bernard. Ensuite, il se rendait chez Maxim’s où il avait sa table. Il y restait jusque vers minuit, se frottant à une clientèle de riches bourgeois, d’étrangers de passage, de cocottes délurées. Noctambule invétéré, il finira par s’installer dans un Palace près de la gare Saint-Lazare après avoir découvert que sa femme lui rendait la monnaie de sa pièce en le trompant. Il mourra en 1921 après deux ans de folie consécutive à une syphilis.




Le comique de l’absolu Baudelaire



« Pour Feydeau, le comique est « le réfractaire du drame » ; de la même manière que, lorsqu’un rayon lumineux rencontre un obstacle, il change de direction et se trouve brisé à son point d’impact, le rire naît d’une déviation de trajectoire, à partir de la même réalité où l’effet dramatique puise sa source. » Robert Abirached


Ainsi, les scènes de ménage ont inspiré Strindberg autant que Feydeau, mais ils n’en ont pas fait le même usage.


Contrairement au rire gentil de Labiche, fin observateur, celui de Feydeau est féroce, énorme, il donne à voir comme le dirait Baudelaire « des personnages comme des moulins à vents tourmenté par la tempête et débouche sur un vertige qu’il cultive jusqu’à l’hyperbole ». Feydeau entraîne ses personnages en un déroulé d’enchaînements inéluctables. « Quand je commence le premier acte, confie-t-il, je ne sais même pas ce qui se passera au second. Je me crée ainsi des obstacles, des impasses. Et c’est la difficulté même que j’ai de sortir des culs-de-sac où je me suis fourré qui me procure les trouvailles les plus drôles et les plus imprévues. Arrivé devant l’obstacle, je le saute sans jamais l’éviter, sans tricherie et sans expédients. J’ai posé en principe qu’on se tire de tout. »


Il malmène tant la logique que le cadre étroit de l’intrigue se défausse, devient abstrait, extravagant. Lui pour qui le vaudeville était une forme de mathématique supérieure amuserait follement le scientifique prêt à tracer tangentes et autres dérivés qui charpentent les pièces de Feydeau. Ou celle de David Lewis qui le pastiche avec la virtuosité de Paganini. Avec eux, aucun trait ne se perd et tous finissent par tresser ensemble la corde avec laquelle se prendre les pieds, car on se s’enfuit pas de chez Feydeau, on se passe la corde au cou et le fil à la patte.


Vaudeville


Comédie légère typiquement parisienne fondée sur l‘intrigue et les quiproquos, le genre fleurissait sur les Boulevards dans la première moitié du XIXe siècle. Pour Henri Bergson, auteur de Le rire, « le genre est à la vie réelle ce que le pantin articulé est à l’homme qui marche ». Pas de psychologie des personnages mais une typologie du bourgeois, généralement de profession libérale, de l’épouse, de la demi-mondaine, « de l’horizontale », du « rastaquouère », du noceur…. Pour ses détracteurs, qui encensaient des auteurs aujourd’hui tombés dans l’oubli, les comédies de Feydeau « ne sont que de vulgaires caleçonnades ». Des lettres de noblesse en somme, héritées des pantalonnades de la commedia dell’arte.


Sachez-le ! Dans une pièce de Feydeau, on ne pose pas, en entrant, son chapeau sur une chaise que je ne me dise pas : bon ! ce chapeau n’est pas mis là pour des prunes. F. Sarcey, critique dramatique du XIXe siècle


Mouvement


Il part d’une situation qui réunit un certain nombre de personnages puis il va devant lui, en rythmant avec une précision croissante la marche des événements. Avec un soin maniaque, Feydeau prévoit tout, il veut de vrais meubles et fait reproduire son propre divan et reconstituer une chambre de l’Hôtel Terminus. Il règle avec un soin méticuleux la disposition des personnages, des objets, l’eau dans le cache-pot, la robe abandonnée sur une chaise, les intonations : « chaque Foutez-le camp ! doit être espacé de deux secondes ; dans chaque intervalle, on entend un « oh ! » indigné. À tout cela se mêlent les protestations, le bruit de la porte d’entrée qu’on ouvre, puis qu’on referme bruyamment sur le dos de quelqu’un. » (Feu la mère de Madame). Et quand il ne peut mieux s’exprimer, il use d’une portée musicale pour rythmer l’échange de répliques. Tout est compté, jusqu’au nombre de portes qui claquent.

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