: La Pièce
« Ils sont deux, dans un même appartement, chacun avec sa propre solitude. Deux
êtres en marge de la vie. L'un est toujours en vadrouille, requis par des missions
mystérieuses, peut-être un tueur. L'autre reste enfermé à la maison, uniquement
préoccupé par le réfrigérateur et par la maladie qui est en train de lui détruire les
poumons. Ils se retrouvent dans cet espace fermé qu'est la cuisine, autour de la
table, centre de ce lieu unique qui leur sert de maison, de refuge, de tanière. Tous
deux s'y cachent, vis-à-vis d'eux-mêmes, vis-à-vis du monde. Aucun des deux n'est
capable de prendre en mains son propre destin. (….)
Dans cet espace fermé, le monde extérieur ne pénètre que par le bruit lancinant
d'une sirène, la sonnerie d'un téléphone auquel personne ne répond, des coups tapés
dans la porte. Mais il y a aussi des enveloppes glissées sous la porte, des enveloppes
qui contiennent de l'argent, des billets d'avion, une photographie, sans doute les
instructions pour une prochaine mission.
Situation à la Pinter s'il en est, une situation qui rappelle celle du célèbre Calapranzi,
où deux tueurs anonymes attendent des ordres qui leur arrivent par un monte-plats
(un "calapranzi" en italien). On sent l'influence du maître anglais, les noms de Koltès
ou de Fassbinder viennent spontanément à l'esprit. Mais la différence, l'originalité de
style de Scimone, vient de l'emploi du dialecte sicilien de Messine. Une langue où rien
n'est abstrait ou littéraire, une langue qui naît de l'expérience théâtrale des deux
jeunes acteurs. Une langue vitale, faite de dialectique entre recherche de style et
concret quotidien (…).
Dans Nunzio, le pathétique n'est pourtant pas de mise. II s'agit plutôt d'une oeuvre
où règne un comique aigre et vague, construit par les interprètes, des clowns
dépourvus de contexte, évoluant apparemment dans l'immobilité. En réalité, chaque
soir, une subtile trame d'actions et de réactions se tisse. Conscients de leur existence
sur scène, dans l'intimité de leur langue, dans la complicité de leurs gestes, lces
personnages transmettent une volonté désespérée de résistance humaine. »
Gianni Mansella
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