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Negerin (Négresse)

mise en scène Franz Xaver Kroetz

: L'Auteur / La Pièce

Né en 1946 à Munich, Franz Xaver Kroetz est une figure majeure du théâtre populaire allemand. Après de nombreux petits boulots comme journalier, chauffeur, infirmier, coupeur de bananes, il connaît son premier grand succès avec Travail à domicile, créé en 1971 à Munich. C'est le début d'une production prolifique de pièces de théâtre, souvent écrites dans une langue qui mêle le dialecte bavarois et l'allemand littéraire.
De 1972 à 1981, il s'engage au DKP, le parti communiste ouest-allemand avant de se tourner vers le mouvement Grün (écolo en Allemagne) puis vers le pacifisme. Il a écrit plus de 50 pièces entre 1975 et 1990, puis sa production s'est ralentie. Il est aussi l'auteur de nouvelles, de romans et de pièces radiophoniques.
Kroetz est non seulement auteur, mais aussi acteur (il s'est notamment fait connaître par la série télévisée allemande Kir Royal) ainsi que metteur en scène. Il a d'ailleurs mis en scène lui-même la plupart de ses pièces. Celles-ci ont aussi été traduites dans de nombreuses langues étrangères. Dans les années 80, il était considéré comme l'un des auteurs vivants les plus joués dans le monde.
D'emblée, son style et les sujets qu'il convoque dans ses pièces ont fait scandale. Il y donne la parole à ceux qui d'ordinaire en sont privés, de la petite bourgeoisie terre-à-terre au sous-prolétariat le plus démuni. A travers eux et la description de fragments de leur vie quotidienne, il pose un regard critique sur l'ensemble de la société, et donne à voir un théâtre politique, révolté et polémique, mais aussi profondément original et singulier, marqué par une langue particulière.


 « Plus j'avance en âge, et plus je me rends compte que je ne suis pas l'écrivain communiste qui trouve sur-le-champ un sujet d'une actualité évidente. Même dans mes pièces sur le chômage, le sujet implique une débâcle existentielle que j'ai moi-même très souvent ressentie sans pourtant avoir été au chômage. Quelle que soit la pièce qu'on examine, on s'aperçoit qu'elle parle d'une mutilation sociale. J'écris beaucoup sur moi-même – bien que j'aie longtemps refusé de l'admettre – même lorsqu'il s'agit d'enfants ou de vieillards. Ces personnages me ressemblent bien plus que le gérant, le directeur A ou B, ou le Monsieur de chez Siemens. Ces derniers ne m'inspirent pas ; je trouve ce milieu ennuyeux ; ces types mous avec leurs attachés-cases ne m'intéressent pas. Je n'écris pas sur des choses que je déteste... Les ruines de ma propre existence, faits marquants du déroulement de ma vie, que j'essaie de comprendre et de présenter sous forme de phénomènes sociaux, m'intéressent de plus en plus. » Franz Xaver Kroetz, Journal


Ses personnages tentent de communiquer mais semblent pratiquement frappés d'aphasie, envahis par le mutisme, jusqu'au silence. Concert à la carte, un de ses grands succès est d'ailleurs une pièce sans paroles : « J'ai voulu briser une convention non réaliste : celle de la loquacité. Ce qui caractérise le plus nettement le comportement de mes personnages, c'est le mutisme, car leur langage ne fonctionne pas. » Incapables de dire ce qu'ils sont et ce qu'ils veulent, il ne leur reste que la pulsion des gestes, la brutalité d'un viol, des coups, voire du meurtre ou du suicide. Il n'en va pas autrement dans Negerin.

Negerin est une pièce de jeunesse remaniée en 1997, qui n'a encore jamais été portée à la scène. Une femme d'une quarantaine d'années avec 3 enfants, invite son jeune amant à manger et à passer la nuit chez elle. Elle est séparée mais non divorcée de son mari qui boit et a perdu son travail. Lorsque celui-ci revient dans l'appartement pour tenter de lui extorquer de l'argent, son désespoir va se muer en violence, et il va s'acharner sur sa femme relayé par l'amant qui lui aussi va laisser libre cours à la brutalité, après tout « elle va pas s'enfuir. C'est une négresse. Elle doit rester. »


Ces personnages qui ne sont définis que par des initiales semblent murés dans la répétition obsession-nelle et involontaire d'une série d'actes et de mots qui conduisent inexorablement à une forme de violence résignée, qui est peut-être la seule à pouvoir exprimer leur solitude et leur malheur. Ces êtres-là ne se détestent pas, mais ils se tourmentent et se brutalisent. Comme malgré eux. C'est Franz Xaver Kroetz lui-même qui met en scène la pièce, en français, avec deux comédiens belges, Laurent Caron et Didier De Neck et la comédienne allemande Ann Tismer, déjà présente sur notre scène cette saison dans Le 20 novembre de Lars Norén et Jeunesse blessée de Falk Richter.


Extrait de “Oh les Beaux soir“, journal du Théätre National, numéro de janvier-fébrier 2009

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