: Note d’intention
Méchant retour de vacances pour Jean-Louis Fournier. Devant sa glace, il comprend qu’il est entré dans l’âge des cheveux qui tombent et de la vue qui baisse, de la carte Senior et des illusions perdues. « Vous savez comment on s’aperçoit qu’on est vieux ? Quand même bronzé on reste moche », dit-il. La vieillesse avance masquée. Il la prend au tournant, lui tord le cou, en rit pour en faire une fête, une croisière plutôt qu’un naufrage. Fournier rit surtout de ce qui n’est pas drôle et c’est hilarant.
Merci à Jean-Michel Ribes de me proposer pour la troisième fois d’accompagner un écrivain dans l’interprétation de son propre texte, lui qui devine si bien la dimension théâtrale de l’homme qui écrit.
Après Victor Haïm et Régis Jauffret, c’est donc Jean-Louis Fournier que je vais avoir le plaisir de regarder vivre sur le plateau, avec pour moi le souci constant que l’acteur et l’auteur s’aiment et se reconnaissent. Dans Mon dernier cheveu noir, de sa belle voix douce et traînante, Jean-Louis se plaint en vain du temps qui passe, du corps qui tombe, des révoltes qui se ramollissent… mais il reconnaît avec fierté que sa vieille voiture de collection prend autant de valeur qu’elle prend d’années.
Entre petites joies et délicates colères, l’auteur est irrésistible de vérité et de drôlerie tant sa mauvaise humeur masque à peine son inclination pour la tendresse et pour la poésie. Tout en pirouettes pudiques, il constate que plus rien n’est comme avant, mais il note, mutin, que les jeunes filles qui l’observent à la dérobée fondent inévitablement pour ces délicieux cheveux gris et mousseux. Avec la complicité de Lisa Navarro à la scénographie, nous proposons à Jean-Louis Fournier une promenade au coeur de son écriture, là où le temps s’écoule, tranquillement.
Anne Bourgeois
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