Comment Louis, votre ami, est-il né ?

Louis a d’abord été un premier texte romanesque : Le Moi de Louis. Il est né d’une attente, d’un rendez-vous manqué avec une scénariste pour un projet de film du genre qui ne verra jamais le jour. Seul, en salle de travail, désemparé devant cet accouchement différé et voulant profiter de ce moment de solitude imprévue, je me suis mis à écrire une autre histoire. Une première phrase : «Louis… se promenait un jour sur un sentier escarpé de la montagne Jurassienne… quand il croisa un homme normal. Le croisant sur ce sentier escarpé… il le poussa brutalement dans le ravin en même temps que de lui dire « Bonjour ! … »

Louis est-il un assassin ?

Quoi de plus normal que de vouloir supprimer son prochain si cet acte est relié à un univers fantasmatique. À partir de ce constat, il n’y a donc pas de limites aux aventures de Louis sauf celles de mon imaginaire. C’est cet imaginaire qui normalise Louis, et à travers lequel chacun trouve sa part de soi, forcément la trouve, parce que Louis est un homme comme les autres avec sa part d’enfance, sa nudité face à la vérité des sentiments explorés.

Sur scène, que va-t-il advenir ? De vous ? De Louis ?

La scène de Louis est un champ de bosses émotionnelles. Il godille entre les mots, bute, se rattrape, s’arrête, est aspiré par le vide d’une pensée, son coeur bat fort, ses jambes souffrent, il rit, il pleure… À l’arrivée il est content, il a raconté et il n’est pas tombé. Il est épuisé. Moi aussi.

Pourquoi avez-vous fait appel pour la mise en scène au cinéaste Nicolas Boukhrief ?

Pour se dégager de ce double, j’ai eu besoin d’un regard créatif qui m’aide à ouvrir le récit, à le structurer pour la scène. Nicolas Boukhrief avec qui j’ai déjà tourné trois films s’est imposé comme une évidence. Notre relation de travail est faite de confiance et de complicité. Il a aimé mon écriture. Il est franc et exigeant. Raconter des histoires est son métier. Il a tout de suite envisagé la nécessité d’une adaptation théâtrale de ce roman en plaçant l’écriture au centre de la représentation. C’est sa première incursion au théâtre.