La première fois que j’ai rencontré « Mon ami, Louis » c’était sous la forme d’un roman intitulé Le Moi de Louis. Je dois dire que dès les premières lignes j’ai été frappé par la forte personnalité qui se dégageait de ces lignes, par la singularité du style, sa puissance évocatrice, et bien évidemment, son humour. Une forme d’humour tantôt féroce, tantôt enfantin, toujours imprévisible.

Le Moi de Louis proposait le portrait d’un personnage cocasse, imprévisible et attachant, qui me paraissait parfaitement synthétiser l’univers tellement particulier de Gilles Gaston-Dreyfus. Pour moi, sans aucun doute, un auteur était né.

À aucun moment cependant, je n’ai réussi à lire ce récit comme un roman, mais plutôt comme une sorte de monologue libre, et inspiré. Impossible de m’approprier ce texte, sans penser constamment à son auteur… Étrange expérience où, au fil de ma lecture, Gilles était comme penché sur mon épaule et lisait sa prose à mon oreille, avec toute la verve et la musicalité dont il est capable.

Je lui en ai bien évidemment fait part et il a aussitôt rebondit en me proposant d’aller plus loin en ce sens et de l’aider à adapter et mettre en scène ce texte pour le théâtre. Un acteur inventif et expérimenté doublé d’un jeune auteur original et inattendu : comment refuser ?

Mon ami, Louis est aujourd’hui pensé pour le théâtre, avec une mise en scène entièrement au service de ce texte. Loin de tout effet démonstratif. Pas de bande-son trop chargée, pas d’effets d’éclairages spectaculaires, ou de projections vidéo superflues. Entendre une langue inconnue assurément, et pourtant étrangement intime… Les spectateurs devront avoir la possibilité de s’évader sur les multiples évocations que propose le personnage. Sans jamais les brusquer ou les contraindre, mais en les prenant doucement par la main pour que Louis, en fin de parcours, devienne à leur tour leur ami. Et au vu de la nature pour le moins complexe du bonhomme, réussir ce rapprochement nous apparaît comme hautement jubilatoire.

Nicolas Boukhrief