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Mingus, Cuernavaca

+ d'infos sur le texte de Enzo Cormann
mise en scène Jean-Pierre Olinger

: Présentation

Propos



« Ce tombeau de Charles Mingus est l’occasion rêvée, inventée, si vraie, d’une longue profération rageuse et désirante de la part du contrebassiste et compositeur dans ses derniers instants … » Post-face du livre( éditions Rouge profond 2003).
C’est pour nous aussi l’occasion d’enrichir notre répertoire dramatique avec une œuvre forte, pleine d’humanité où résonnent les derniers cris d’un homme au seuil de l’agonie alors que son art aspire à l’immortalité Mingus, Charles, (et non pas « Charlie » surnom honnie éructe-t-il dans son livre autobiographique « Moins qu’un chien ») a réussi à sortir le jazz des caves et autres boîtes de nuit en composant du jazz symphonique. Ici il nous sort de notre torpeur en criant sa détresse face à cette finitude qu’est la nôtre.
Il est bien présent, là, dans son désespoir et son appréhension de la mort. En ce sens il touche tout un chacun. Mais c’est bien plus que la mort qu’il invective, c’est la maladie qui l’entraîne dans l’abîme du néant avant même la fin. « SLA moins qu’un chien ! »[1] . Mingus meurt à Cuernavaca : quel paradoxe ! Agoniser dans une ville de villégiature. En fait il espère…
Enzo Cormann a écrit un « jazz poem » dont la puissance évocatrice nous a fasciné lors de la présentation du spectacle à la « Fabrique » à Valence. Tout le jazz est présent dans cette ode.
Fascination d’autant plus forte que ce texte pourrait être biographique. C’est depuis qu’est né notre désir de reprendre ce spectacle.




Le spectacle


Le décor
Quelques accessoires : un siège vert et un rouge, deux cubes blancs, un paravent couvert d’une peinture de Cuernavaca, et un portique avec un grand plastique blanc. Un fauteuil roulant aux couleurs du Mexique. Quatre pupitres noirs.


Les personnages
Une récitante et un récitant.
Les musiciens : un contre-bassiste, un saxophoniste.


Les Costumes
les musiciens en tenues colorées, la récitante en robe blanche et le récitant en chemise et pantalon noir.


L’histoire
Sorte de polylogue, ou les récitants jouent avec le texte en harmonie avec la musique.
Une narratrice nous raconte la fin tragique de Charles Mingus. Il se confie à l’infirmière.
Un paravent composé d’un portique et d’un plastique sur lequel sera peint (en scène) le portrait de Charles Mingus représente à la fois la toile de projection de ses rêves éveillés et la limite entre la narration et la réalité de son jeu avec l’infirmière. C’est aussi le voile qui cache ou qui révèle la connaissance. Quelle connaissance ? Celle de l’au- delà ? Ce peut être aussi la voile de la barque des morts ou de la nef des fous dans laquelle on entassait les exclus de la société (mendiants, grabataires, infirmes, fous, prostituées…) au Moyen Age ou encore un « lambeau de ciel »que Mingus arrache dans son élan créateur.
Il finira par s’identifier aux cinquante-six cachalots « suicidés » le jour de sa mort sur la côte mexicaine en basse Californie.
Ce voyage est rythmé par le son de la musique tantôt triste tantôt joyeuse, tantôt grave, … enfin, le jazz entre vie et mort.




La mise en scène


Intentions


Le jeu intègre l’ensemble des acteurs dans une sorte de symphonie musicale avec voix et instruments. Le rythme du texte sera la trame, le fil rouge de l’ensemble : jeu théâtral, lecture, musique, performance.
Trouver le swing du morceau de théâtre est le maître mot de la mise en scène.
Qui de la narration ou de la musique prendra le pas ? Nous n’en savons rien, mais comme dans le texte de Enzo Cormann, c’est la vie, encore la vie qui s’insinue dans tous les recoins des syllabes, des mots, des phrases prononcées, suggérées, murmurées, susurrées, à peine dites, tues.


La musique est celle que Jean-Marc Padovani a composée en harmonie avec le texte. Musique improvisée par moment également à partir des thèmes exposés.
Marier la contrebasse, intrument rythmique et harmonique et le saxophone, essentiellement mélodique peut surprendre. Toutefois c’est pour nous un parti pris d’utiliser ces deux instruments afin d’offrir une couleur sud américaine du fait du contraste ainsi produit. La contrebasse et sa résonnance venue des profondeurs de la terre va tisser une trame reprise en contre-champ par le saxophone dont le registre est beaucoup plus éthéré.
Les musiciens doivent faire preuve d’imagination et de virtuosité pour affronter une distribution sans un support harmonique riche donné par un instrument. C’est une expression au confin de l’âme de chaque instrument que nous voulons entendre.
Entendre la contrebasse « a capella » comme si Mingus nous parlait…


La genèse du « jazz poem »


Le texte a été écrit en 1990-91dans la perspective d'être dit sur scène par l'auteur, associé à la musique de Jean-Marc Padovani. La musique a été interprétée par une formation de neuf musiciens.
Enzo Corman et Jean-Marc Padovani se sont allés sur les traces de Charles Mingus au Mexique à Cuernavaca (lointaine banlieue de Mexico), dans la maison même où il attendit la mort, condamné par la maladie qui le clouait sur une chaise roulante.
Il était entouré de sa femme l'actrice Suzan Graham. Il avait suivi le conseil de Gerry Mulligan dont un ami venait de revenir guéri du Mexique. Selon une autre hypothèse Charles Mingus serait venu à Mexico pour consulter une sorcière de grand renom « Ponchita » afin qu'elle le délivrât du maléfice dont il se croyait la victime.
Le microclimat et la végétation luxuriante composée d'essences tropicales, bougainvillés, eucalyptus, palmiers…, ont accompagné Mingus dans ses derniers jours passés à la « casa verde », face aux volcans. Dans la préface du livre, Enzo Corman précise que quatre jours après la mort de Charles Mingus survenue le 5 janvier 1979, « le journal mexicain « El Excelsior » annonçait en première page, photos à l'appui, le surprenant suicide collectif de cinquante-six cachalots, venus s'échouer sur les côtes mexicaines. Le même journal a annoncé en page neuf la mort de Charles Mingus âgé de…cinquante-six ans. »

Notes

[1] SLA : Schlérose Latérale Amyotrophique ; maladie neurologique dégénérative.

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