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Merlin ou la Terre dévastée

mise en scène Rodolphe Dana

: Note d'intention

On ne comprend jamais complètement ce qui préside au choix d’une pièce et le désir qu’on a de la monter. Le désir, par essence, échappe à la raison, et c’est tant mieux. Lorsque j’ai lu Merlin ou la Terre dévastée, j’ai ressenti de la joie. Je sais c’est un vieux mot, un peu galvaudé, trop général, et qui, peut-être, ne veut plus rien dire, ce mot-là, joie. Mais, voilà, c’est ce que j’ai ressenti, de la joie. Une forme de puissance joyeuse, plus exactement, et qui serait le poumon de cette généreuse et folle épopée.


Chez Tchekhov et Lagarce, il fallait en passer par la parole, l’intime de la parole, pour atteindre à l’émotion des corps, une façon de tendre à l’universel. Chez Dorst, le trajet semble inverse : nous devrons passer par les pulsions des corps pour atteindre à l’intime de la parole, autre façon de tendre à l’universel. À une époque où tout s’analyse et se comprend, il me semblait nécessaire et rafraîchissant de se plonger dans un théâtre instinctif, où la vie est avant tout une réalité à éprouver. Et par la même occasion, redonner à ces mots-là instinct, pulsion, une signification moins péjorative qu’aujourd’hui, une légitimité civilisante. Chaque homme porte en lui, à égalité, une part d’humanité et d’inhumanité. C’est de ça aussi dont parle Merlin, les forces de construction et de destruction qui sont à l’oeuvre en chacun de nous et qui font de nous des êtres, par essence, fondamentalement bons et mauvais.


Il y a aussi du jeu dans Merlin..., du jeu théâtral, du théâtre dans le théâtre, comme on dit. Beaucoup plus que chez Lagarce et Tchekhov. Du jeu au sens noble, pur et archaïque du terme. Nous réaffirmerons la place essentielle qu’occupe l’acteur dans le théâtre qu’on se propose et nous réinterrogerons les relations multiples qu’il doit entretenir avec le public et son partenaire, en fonction de la singularité du texte choisi. Par exemple, nous ne ferons pas croire aux spectateurs que nous sommes ailleurs qu’au théâtre et que nous autres acteurs nous ne sommes qu’occasionnellement des personnages. Abolir ce mensonge-là, sera aussi une façon de rétablir, non pas une vérité, mais une forme de croyance. Pas seulement que les spectateurs voient et entendent ça, du «théâtre», mais qu’ils y croient. Qu’ils y croient comme à une autre réalité, à une autre possibilité de la vie. Parce que, comme dirait l’autre, la vraie vie est ailleurs...


Enfin, je ne peux guère aller plus loin dans cette petite note sur Merlin..., au risquede verser dans le mensonge complaisant du comédien qui théorise son art, lequel n’a pas besoin de ça pour exister. Je m’arrêterai là, et j’ai hâte que les répétitions commencent...

Rodolphe Dana

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