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Master

+ d'infos sur le texte de David Lescot
mise en scène Jean-Pierre Baro

: Entretien avec D. Lescot et J-P Baro

propos recueillis par Maïa Bouteillet décembre 2014


Quel est l’origine du projet Master ?


David Lescot : « On a imaginé dans une sorte d’anticipation que le rap est devenu une matière enseignée au lycée. Ça n’est d’ailleurs pas si in- congru que ça... Un élève va donc être interrogé par son professeur. C’est vrai que le rap regroupe beaucoup de domaines : l’histoire, la dimension sociale, la dimension musicale, technique, poé- tique évidemment, littéraire. Le point commun des rappeurs, c’est qu’ils adorent le texte. »


Jean-Pierre Baro : « Ce qui m’intéressait, c’était l’histoire, et les trous de l’histoire. Je trouvais formidable de pouvoir aller dans un collège ou un lycée et de parler de ces béances dans l’en- seignement de l’histoire en France. En parlant de cela avec David, on s’est également penchés sur la forme et on s’est rendu compte qu’on avait tous les deux une inclinaison pour la musique, notamment pour le rap.


Comme le rap parle de ces trous de l’histoire : par exemple des Massacres de Sétif, Guelma et Kherrata ou des camps de Thiaroye, dont on ne parle pas du tout au col- lège. La naissance du rap, c’est quand même la contestation face à une oppression sociale. Ça a donné des textes assez violents à l’image de celle subie, qui est renvoyée textuellement pour se sortir de cette oppression sociale. Effectivement, la contestation est très en lien avec les mouvements de décolonisation, avec cette his- toire coloniale française. On ne peut pas parler de l’histoire du rap français sans évoquer l’histoire coloniale. »

Quel est le dispositif de la pièce ?


Jean-Pierre Baro : « Une salle de classe avec deux acteurs, un professeur et un élève, entourés par la classe. Ce qui fait plus d’acteurs, ils seront peut-être trente-quatre, parce qu’il y aura des réactions dans la classe, les élèves vont forcé- ment réagir. L’écriture de David est très structu- rée, très musicale. C’est passionnant d’aller parler de rap dans les lycées et les collèges, où c’est quand même la culture centrale. »


David Lescot : « A travers le rap, il y a forcément un écho avec ce que les élèves sont, avec ce qu’ils aiment, avec ce qu’ils écoutent. Mais après, il faut détourner cela, l’emmener ailleurs. Il faut les surprendre et être inattendu sinon ça n’a pas d’intérêt. La question qui est posée est celle que se pose l’éducation. Qu’est-ce qu’on fait de cette culture qui est celle des gens à qui l’on doit l’enseigner.
Est-ce qu’on essaie de se l’approprier ? Est-ce qu’on la leur renvoie ?
Ce sont des vraies questions de société, d’éducation, qui m’intéressent vraiment beaucoup. A partir du moment où le rap, qui est une contre-culture, une culture de révolte, de rébellion se trouve récupérée par l’institution scolaire, est-ce qu’elle n’est pas en train de se perdre ? Est-ce que la rébellion peut s’enseigner ? Alors quel message délivrer ?
Je ne sais pas trop... J’ai surtout envie de m’amuser, de jouer avec tous ces éléments. Qu’est-ce que ça peut être un cours de rap ? Qu’est-ce qu’on peut en tirer d’un point de vue du jeu théâtral et poé- tique ? Ce qui m’intéresse, ce sont les retourne- ments. La battle est une figure du rap, où l’on combat l’un contre l’autre avec les armes de la parole et de la technique du rap. On peut imaginer que, dans cette épreuve, le professeur et l’élève s’affrontent vraiment, puis on s’aperçoit que c’est juste une partie de l’exercice, et peut- être ça repart... C’est le jeu de faux-semblant qui m’intéresse là-dedans. »


Quel est l’enjeu de faire du théâtre dans une salle de classe ?


Jean-Pierre Baro : « Je dois beaucoup au lycée et au collège, car je ne viens pas d’une famille d’artistes. C’est grâce à une prof de théâtre en Première, qui nous a emmené voir des spectacles, que j’ai vécu mon premier choc. C’est donc quelque chose qui est important pour moi. Le rôle de l’école et du lycée est fondamental : c’est une ouverture formidable vers l’art, qu’on essaie de faire passer pour un bonus, alors que c’est essentiel.

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