Nous vivons aujourd’hui dans une société d’hyperconsommation, d’hyper- information, d’innovation technologique exponentielle. C’est dans ce contexte que vivent les personnages de Love & Money et c’est un élément essentiel pour tenter de décrypter leur mal-être. Ces personnages semblent submergés et parviennent avec difficulté à se construire une idéologie et des valeurs, à discerner ce qu’ils désirent vraiment de ce qui leur est suggéré. Le sentiment d’exister se perd dans un vide profond, un mal-être du XXIème siècle dont Jess incarne la figure tragique.

Pour exprimer cela, j’ai choisi de placer cette étude au sein d’une machinerie industrielle. Chaque scène devient alors un produit, une marchandise apportée sur scène, dépouillée momentanément de son humanité et prête à être consommée. Une fois la scène terminée, elle est remplacée par la suivante, laissant seulement une empreinte, une trace de son passage. Ce fonctionnement scénographique raconte également l’enfermement et l’aliénation de tous les personnages de la pièce.

C’est aussi un jeu de contraste entre la froideur de la machinerie et la vie qui se déploie à l’intérieur des scènes. Contraste entre les matériaux bruts industriels (bâche PVC, diables, palettes et transpalette, bruit de moteurs et souffleries,...) et le réalisme des lieux et des personnages à l’intérieur des scènes (canapé, bureau, ordinateur, vêtements quotidiens, boissons, et recherche d’une vérité sensible des acteurs). La création lumière jouera elle aussi sur cette dualité, mettant en valeur la machinerie d’un côté et créant de l’autre, des espaces précis et identifiables dans lesquels s’inscriront les scènes.

Benoît Seguin