Grande comédie de mœurs sur les dévoiements du bel esprit, satire de la préciosité extrémiste, dénonciation du pédantisme, Trissotin ou Les Femmes savantes est le titre donné à la pièce de 1672 par Molière à la reprise du spectacle. C’est dire le rôle central du poète flagorneur et hypocrite. Plus qu’une satire des femmes ou du savoir, l’avant-dernière pièce de Molière est un portrait de famille où l’intérêt règne en maître. Molière y allie le comique et le pathétique et impose une vision sceptique du monde que seul le rire peut déjouer. Plus que la misogynie que Molière fait entendre, c’est cette terreur que provoque chez les hommes l’illimité du désir féminin qui interroge Macha Makeïeff. Les excès des femmes dans cette maison envahissent l’espace domestique et le mettent en danger. Dans ce combat permanent, qui pourrait facilement transformer en tragédie cette comédie au verbe haut et fort, portée par des interprètes virtuoses et hantés, les hommes ne s’en sortent pas mieux que les femmes. Ils sont presque égaux en douleur, en impuissance, en confusion. Dans cette maison hallucinée, seuls la ruse, la fiction, le mensonge, le stratagème, le rire, la musique et quelques artifices, – c’est-à-dire le théâtre et ses armes – viendront à bout de la folie et de ses tourbillons.