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Les Amantes

mise en scène Joël Jouanneau

: Entretien de Joël Jouanneau, metteur en scène

par Pascale Gateau et Valérie Valade

« J’ai voyagé dans ce roman, Les Amantes, pendant 7 ou 8 ans, en le relisant régulièrement, jusqu’à ce que j’aie le sentiment de l’avoir pratiquement écrit, de le connaître à l’intérieur de tout mon être. Je savais où était telle phrase, telle autre. Il n’y a pas un mot de moi, tout le texte est de Jelinek. Mais c’est plus qu’un découpage. J’ai fait sans cesse des déplacements de texte, en gardant la structure des chapitres : un chapitre sur deux Paula, un chapitre sur deux Brigitte. Les propos des personnages ne sont pas toujours ceux qu’ils tiennent dans le livre. C’est ce qui a permis de faire du théâtre, ce que l’on a appelé « Théâtre-récit ».(…)
Je pensais aussi qu’il fallait que je travaille sur la mise en opposition entre des couleurs qui peuvent apparaître comme « kitch » - une esthétique de roman-photo - et des propos cruels. C’est comme un bonbon au poivre. J’ai tenté ça pour Les Amantes : le bonbon au poivre.(…) Le travail que j’ai fait sur Jelinek est assez proche du travail que j’ai pu faire sur Beckett, Bernhard avec Minetti, et aussi Lagarce ou Pinget. Pour moi ce sont des musiques. Je ne travaille jamais sur le sens avec les comédiens. Je leur demande de venir texte su, de visualiser la ponctuation, de retrouver le souffle de l’auteur, et pendant le travail on ne parle que de questions musicales : plus vite, plus haut, moins fort, plus lent. On ne se pose jamais la question du sens, le sens devant apparaître quand on a trouvé la musique. Il doit jaillir de lui-même, et à ce moment-là c’est un sens pluriel. Plutôt qu’une lecture personnelle, a priori, que j’imposerais au texte ou aux acteurs, je préfère ce travail-là. Cela demande aux comédiens d’incarner une musique, c’est-à-dire d’être d’abord des exécutants – ils savent la place des virgules, des points (et les points, chez Jelinek, c’est important) – pour ensuite oublier ce travail et interpréter cette musique, incarner la langue. C’est là qu’ils ont été, je trouve, assez exceptionnels. »


Propos recueillis en novembre 2003

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