Je ne vois pas double, mais triple, quadruple, quintuple... je vois au travers d'un prisme aux angles infinis où la vie explose tous azimuts. C'est avec ce regard sur le monde qui sans cesse se fragmente et se multiplie que j'aborde l'acte d'écrire.

Je ne vois pas la vie comme une suite logique d'événements traçant un chemin linéaire de notre naissance à notre mort. Alors je n'écris pas des pièces où chaque morceau du récit, comme dans un casse-tête, s'emboîte parfaitement l'un dans l'autre. Le monde que je vois est à ce point vaste et complexe qu'il m'est impossible de l'embrasser d'un seul regard. Je n'en vois que des fragments.

Le but ultime de mon travail consiste à porter sur scène cette vision kaléïdoscopée de la réalité. Il faut que les divers angles de vue que je porte sur le monde puissent se juxtaposer, tels une mosaïque ou une peinture cubiste. La parole doit naître de la cohabitation et de la confrontation de ces possibles.

Il ne s'agit donc pas d'une déconstruction du récit, mais bien d'une tentative acharnée du récit, un désir impérieux de faire surgir un sens là où il n'y a que du vacarme.

Francis Monty