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Le Philosophe et la putain

+ d'infos sur le texte de Jacques Rampal
mise en scène Elsa Royer

: Notes d'auteur

Diogène l’Indigné

On le connaît mieux sous le nom de Diogène le Cynique, non au sens actuel du terme (impudent, éhonté), mais au sens philosophique, le Cynisme étant un des nombreux courants de pensée de la Grèce antique, qui prônait l’abstinence, le courage, la totale liberté, le retour à la Nature et condamnait les plaisirs : être cynique – du grec kunikos, le chien –, c’était vivre hors des lois sociales, de la façon la plus austère mais aussi la plus heureuse, puisque le bonheur selon Diogène est dans le dénuement.


C’est pourquoi je souscris entièrement à l’idée d’Elsa Royer d’un « Diogène musical » : Diogène, c’est une force qui va, un joyeux ouragan, un fou chantant, même quand il hurle sa révolte face aux injustices toujours grandissantes, à la manière des Indignés d’aujourd’hui, même quand il se heurte à Antisthène, à Platon ou à ces deux vagabonds que sont Cratès et Hipparchia qui osent se présenter comme ses disciples, même quand il affronte Alexandre le Grand. Et même quand il hurle, il chante. Et quand il ne chante pas, il parle en alexandrins, c’est-à-dire en musique, avec tous les autres. Et toujours en musique, il cherche un homme, un homme digne de ce nom, introuvable, donc.


Mais cet anarchiste avant la lettre, d’une troublante modernité, est aussi le plus paradoxal des penseurs : obsédé par la notion d’égalité – avant celle de liberté –, il défend le régime de Sparte, terrible dictature où l’on embrigade les citoyens dès l’enfance, comme certains soixante-huitards admiraient la Chine de Mao Zédong…


Mais finalement humain, notre Cynique, qui, après avoir refusé l’amour comme étant la pire des prisons pendant toute une vie, finira par y succomber… juste avant de succomber pour de bon, dans les bras de la plus humaine des humains, lui qui « cherchait un homme », en la personne d’une divine prostituée...


Si l’Histoire est trop souvent « un éternel recommencement », c’est qu’on ne sait pas en tirer les leçons, s’imaginant qu’on pratique la philosophie du carpe diem alors qu’on cultive une mémoire de poisson rouge. Il n’y a rien de nostalgique dans ma passion pour l’histoire : sur les douze pièces que j’ai écrites, quatre seulement concernent le passé, et j’ai toujours eu le sentiment d’évoquer le présent en les écrivant.


En cette période troublée où l’avenir semble si incertain, ce proverbe sénégalais me vient souvent à l’esprit :
Quand tu ne sais pas où tu vas, retourne-toi et regarde d’où tu viens.

Jacques Rampal

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