: Note d’intention
Rédigée après la résidence à la Chartreuse
Anthony Neilson, pourtant l’un des plus importants représentants du mouvement « in yer face »* déteste ce terme agressif et préfère qualifier son théâtre d’ « experiential theatre », c’est à dire de théâtre qui privilégie l’expérience du spectateur.
Il ne faut pas montrer mais donner à vivre une journée de Lisa au spectateur.
Qu’il fasse l’expérience lui-même de la réalité de cette jeune femme.
Lisa est dans le premier acte, spectatrice de son propre monde au même titre
que le public. Elle a ses propres sensations, le public n’est pas obligé d’avoir les
mêmes.
Pour permettre au spectateur de vivre sa propre expérience, il faut rester fidèle à
l’esprit de spontanéité et d’urgence d’Anthony Neilson, c’est-à-dire être toujours
attentif à l’instant présent, s’autoriser jusqu’au bout à adapter la pièce en fonction
des comédiens (l’auteur le recommande même), ce qui veut dire suivre leurs
improvisations ou même rajouter des personnages. Il ne faut jamais laisser le
public s’installer dans une situation ou un genre théâtral mais passer sans
transition d’un style à un autre, brouillant les pistes entre réalité et fiction,
privilégiant le ludique de la situation avant tout et ne pas avoir peur de le
submerger avec une avalanche de sons, de couleurs, de situations. Les ruptures
doivent être tout à fait naturelles pour les comédiens que j’ai volontairement
choisis pour leurs horizons différents (burlesque, expérimental, classique etc.…).
Le monde de Lisa est un monde où la profusion et le chaos règnent, où la peur
côtoie la joie, où l’horreur fréquente la douceur.
Enfin David Lynch, Philipp K. Dick, Hitchcock entre autres ainsi que des
ouvrages psychiatriques seront des inspirations pour la peinture qu’ils font tous
des états de folie mais il est absolument nécessaire qu’ils restent à ce niveau et
qu’ils ne deviennent pas des citations. Il faut être à l’affût de tout ce qui pourrait
interrompre l’expérience du spectateur en le renvoyant derrière ses barrières
intellectuelles. De même, les Monty-Python, Lewis Carrol et tous les contes pour
enfants seront nos inspirations pour le merveilleux et l’absurde.
Mais le monde de Lisa, aussi fou soit-il, n’est pas une invitation à aller de l’autre
côté du miroir, c’est bel et bien une réalité bien concrète, qui nous est proposée
ici.
Lisa est-elle schizophrène, bi-polaire, maniaco-dépressive, borderline...?
Peu importe, il est toujours bénéfique de se rappeler qu’il y a autant de réalités qu’il y a de personnes.
Et si on le fait avec humour et dérision, c’est encore mieux.
À l’acte 2, grâce à une mise en scène naturaliste et sans ruptures, nous
replacerons le spectateur dans sa position de voyeur. Dans cet acte, il verra Lisa
se débattre avec sa maladie et peut-être que fort de son expérience de l’acte 1, il
pourra avoir accès à une compréhension tout à fait intime de cette autre réalité
qui lui a été proposée de vivre.
Cherchons à vivre de façon le plus authentique possible un moment d’une vie qui
n’est pas la nôtre, après on verra…
* « dans ta gueule »
Catherine Hargreaves
août 2009
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