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Le Libertin


: Michel Kacenelenbogen à propos…

Au moment où j'écris ces lignes, nous venons de donner trois représentations du Libertin en plein air, devant le château de La Fraineuse, dans le cadre du Festival de Spa. Rarement j'ai « traqué » - au sens d'avoir peur de décevoir - comme dans les jours qui ont précédé cette première spadoise. J'ai beau avoir joué dans deux pièces d'Eric-Emmanuel Schmitt, le mettre en scène s'est avéré une tout autre aventure. Pour bien interpréter son rôle, l'acteur ne doit surtout pas se regarder jouer. Or mettre en scène consiste précisément à lire et à regarder, puis à choisir. Sous l'angle du regard, jouer et mettre en scène sont des démarches exactement opposées...


Les pièces d’Eric-Emmanuel Schmitt sont totalement achevées dans leur structure et dans leur propos. Tous les éléments de l'intrigue et de la psychologie des personnages sont résolus et contenus dans le texte. A aucun moment on n'est en manque de cohérence. Et pourtant, les spectateurs sortent en se posant des questions, c'est toute la force de ce théâtre. Et pourtant ce n'est pas du théâtre à lire,
mais bien à jouer : ces textes ont besoin de chair, ils doivent être habités par des êtres humains, pour prendre tout leur relief. C'est alors qu'éclatent la clarté et la beauté de sa plume, la subtilité et l'humanité de sa philosophie.


Mon travail a donc consisté à tenter, tout au long des répétitions, à aider des acteurs par ailleurs éminemment responsables à s'approprier le verbe et l'action de la pièce. Schmitt responsabilise les acteurs dans le sens où il leur donne réellement quelque chose à jouer.


L'avantage d'un auteur vivant, résidant de surcroît à Bruxelles, est qu'on peut lui demander son avis. J'ai pu apprécier lors de sa visite la manière qu'a Eric-Emmanuel Schmitt de donner clairement son avis sans l'imposer, de résoudre les éventuels problèmes par la profonde connaissance qu'il a du sujet de sa pièce. Pas besoin de « dramaturge » ou de conseiller historique avec lui. C'est que, dans l'ensemble de son oeuvre, Le Libertin a un statut un peu particulier. Il y parle d'un personnage historique, sur lequel il a fait sa thèse de doctorat en philosophie. Il n'y a pas une pensée exprimée dans le texte qui ne soit validée par cette connaissance, et pourtant tout est inventé : c'est une vraie création d'auteur dramatique.


C'est la première fois que je monte une pure comédie. Quand elles sont de cette qualité-là, je me dis que c'est un genre sur lequel je reviendrais volontiers. Le Libertin joue sur plusieurs registres de comique : il y a un élément de vaudeville, comme la scène de l'âne de Buridan ou l'explication de Diderot avec sa fille, à côté d'autres scènes à l'humour plus sociologique voire métaphysique, comme la réflexion sur le mariage et la double morale, privée et collective.


Je me réjouis enfin que ce spectacle soit promis à une longue série de représentations, au Théâtre Jean Vilar et à l'Auditorium 44 et au Public.



Michel Kacenelenbogen
Spa, août 2004

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