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Le 20 Novembre

+ d'infos sur le texte de Lars Norén traduit par Katrin Ahlgren
mise en scène Simon Delétang

: Entretien avec Lars Norén

Bernard Debroux : Que pensez-vous du pouvoir du théâtre face aux médias tels qu’Internet, la presse écrite ou la télévision ? Le théâtre est-il devenu un art mineur ?


Lars Norén : Je ne pense pas. Le théâtre a survécu pendant près de deux mille ans et il est encore aujourd’hui très vivant. C’est un lieu où vous pouvez voir des personnes vivantes raconter des histoires importantes à d’autres personnes. Si vous regardez la télévision, si vous allez voir un film au cinéma, vous pouvez vous protéger. Vous pouvez vous cacher, faire autre chose. Quand vous êtes assis dans un théâtre et que vous regardez ce qui se passe sur scène, vous n’avez pas de défense. Il n’y a pas d’échappatoire. À l’école, de nombreuses leçons sont données sur le drame du nazisme et du néonazisme. Les jeunes vous diront qu’ils le savent et qu’ils en ont assez d’en entendre parler. Souvent, ils ne seront pas attentifs. S’ils viennent au théâtre et regardent ma pièce, ils ne peuvent plus se protéger. Ils doivent affronter la réalité. Ils sont sans défense. C’est le pouvoir du théâtre. Vous êtes seul au milieu du public. Même si vous êtes venu avec votre femme ou votre mari. Vous êtes seul avec l’histoire et les acteurs. C’est devenu très rare de nos jours.


B.D. : Croyez-vous dans le pouvoir de la catharsis qui aide les spectateurs à supporter le choc du théâtre ?


L.N. : Il existe différentes catharsis. Mon idée n’est pas de séduire le public avec de la musique, une belle lumière, un décor fantastique. Je veux que le public soit séduit par son esprit critique, que la pièce ait un effet sur lui. Vous pouvez avoir une émotion et l’instant d’après c’est fini, vous pouvez de nouveau être le même. Mais si le cerveau, l’esprit critique est touché, alors l’émotion persiste et vous pouvez être influencé.


B.D. : Les spectateurs de vos pièces les décrivent comme très sombres, mais y ressentent de la compassion. Êtes-vous un optimiste ?


L. N. : Non, pas vraiment. Mais écrire est une action optimiste. (…) En fait, nous sommes déjà morts. C’est juste une question de temps. Nous sommes assis en ce moment, nous discutons, mais nous sommes déjà des souvenirs. Chaque chose est en train de mourir. Vous n’êtes pas le même qu’hier. Cela prend du temps de comprendre ce concept. Je ne crois pas en Dieu. Je trouve que le monde est plus beau dans l’idée qu’il s’est créé lui-même. Finalement, nos actions sont sans importance. Si vous voyez quelque chose de beau sur scène, c’est déjà fini dans l’instant.


Extrait d’un entretien avec Lars Norén réalisé par Bernard Debroux, in Alternatives Théâtrales n°94-95 / novembre 2007.

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