“Alors on y va ?” Voici en résumé la question fondatrice d’une des plus grandes oeuvres du théâtre du XVIIIe – léger, n’est-ce pas ? Tant mieux, c’est une comédie ! La Trilogie de la villégiature de Goldoni, écrite en 1761, est un monument théâtral. Elle brosse le tableau corrosif d’une bourgeoisie de province frivole et pourtant profondément humaine. Pour “le standing”, on doit s’installer pour l’été à la campagne. Le départ est laborieux, empêtré dans des querelles totalement futiles : problèmes de fringues, de couples, de valises. Puis on s’en va enfin… et en vacances on meurt d’ennui, alors on intrigue, on attise les rancoeurs. Précis, incisif, féroce,Goldoni a l’art de révéler les travers de ses contemporains.

Thomas Quillardet, jeune metteur en scène qui s’attaque à ce grand classique, a choisi de ne traiter que les deux premières parties de l’oeuvre : le départ et la villégiature. Nourri sans doute aux Vacances de monsieur Hulot ou aux grands huis clos amicaux où “c’est tellement chouette d’être ensemble ! ”, il se saisit de l’intrigue et de la langue avec énormément d’humour et d’énergie. On rit beaucoup dans cette trilogie de tréteaux loin des langueurs de la campagne estivale : les portes claquent, ça geint, ça chante. Les acteurs sont formidables.

Cette manière pathétique de vouloir être de “son rang”, ce côté “bling-bling” qui se rêve aristocrate, cette façon de traiter le paraître comme unique enjeu dans un monde un rien décadent… Si ce n’était la langue, cette Italie d’un autre siècle… Trop facile de dire que les grandes oeuvres sont par nature éternellement modernes… Quant à se désoler des humains… Alors, hier ou aujourd’hui, rions !