theatre-contemporain.net artcena.fr

Accueil de « La Reine de beauté de Leenane »

La Reine de beauté de Leenane

+ d'infos sur le texte de Martin McDonagh traduit par Gildas Bourdet
mise en scène Gildas Bourdet

: Le metteur en scène

En 1898 sur le conseil de Yeats, alors président de l’Irish National Theatre Society, John Millington Synge quitte Dublin pour les îles d’Aran à l’ouest du Connemara afin d’y vivre avec les paysans et d’y apprendre le gaélique. De cette expérience fondatrice naîtra l’essentiel de son oeuvre dramatique, dont Le Baladin du monde occidental est la pièce la plus connue, fortement inspirée par le baragouin anglo-irlandais des paysans du comté de Galway (est-il besoin de rappeler que « baragoin » est né de la francisation de deux mots bretons qui signifient « pain blanc »). Contrairement à Yeats, Synge, Shaw, O’Casey, Behan et Beckett dont il semble l’héritier naturel, Martin McDonagh n’est pas irlandais.
Il est né dans un quartier ouvrier de Londres il n’y a guère plus de trente ans, de parents d’origine irlandaise.
Mais il a lui aussi fait le voyage du comté de Galway à l’occasion de ses vacances scolaires et il a lui aussi entendu ses oncles et ses tantes baragouiner l’anglo-irlandais des habitants du Connemara.
Plus tard, il fera presque involontairement de cette découverte la matière de son théâtre, et il dira qu’il entend les voix de ses personnages dans sa tête et qu’écrire revient pour lui à retranscrire la parole des autres. En l’occurrence de ces autres d’en bas qui ont si peu accès au statut de personnages dans notre théâtre et dans notre cinéma français, alors qu’ils peuplent le cinéma anglais d’aujourd’hui, celui de Ken Loach, de Mike Leigh ou de Stephen Frears par exemple.
Il est vrai qu’il n’est pas facile de « faire l’intelligent » avec des personnages qui n’ont guère plus de quatre-cent mots à leur vocabulaire et qui seraient bien en peine de philosopher sur leur destin et encore moins sur celui du Monde.
Ce sont pourtant bien ceux-là que Martin McDonagh a convoqué dans son théâtre, gens de peu qu’animent de violentes passions et de profonds mouvements de l’âme qu’ils n’ont pas les moyens d’exprimer par les mots.
Au point qu’à juste titre le spectateur est sans cesse dans la crainte d’un possible et désastreux passage à l’acte, oscillant de la sympathie à la détestation, de l’apitoiement au rire car ce théâtre-là est souvent de la même drôlerie que celui de Beckett. Le comique y naît de l’inajustement des personnages à eux-même et aux autres, de leurs démêlés avec les mots, et de l’empathie dont l’auteur fait preuve à leur égard.

Gildas Bourdet

imprimer en PDF - Télécharger en PDF

Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné, Je me connecte Voir un exemple Je m'abonne

Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.