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La Gelée d'arbre

+ d'infos sur le texte de Hervé Blutsch
mise en scène Benoît Lambert

: La gelée d’arbre, un vaudeville noir

La Gelée d’arbre emprunte sa structure et ses thèmes au roman ou au film noir : organisée autour de la cavale meurtrière des deux héros, Clamince et Maxence, la pièce accumule les scènes de genre (meurtres, fusillades, chantages, trafics divers) et plonge le spectateur dans un univers qui est à première vue clairement celui du polar. C’est d’ailleurs le premier intérêt du texte que d’aller puiser son inspiration ailleurs que dans les formes théâtrales héritées, en recyclant tous les clichés d’une culture de série B.


Mais ce recyclage ne se résume pas à un jeu de clins d’œil ou de citations pour initiés. En permanence, Blutsch décale et déplace les personnages et les situations pour inventer un univers très personnel, à la fois atroce et cocasse. Ainsi, les deux héros assassins sont des gagmen (profession étrange sur laquelle on n’obtiendra d’ailleurs que fort peu d’informations), cannibales de surcroît, le policier chargé de l’enquête aime mettre du sucre sur la peau des prostituées, l’une des deux héroïnes est une danseuse de cabaret affligée d’un pied-bot, le directeur de la prison qui laisse échapper Clamince et Maxence se transforme progressivement en chien, etc...


Ce qui se dessine à travers cette galerie de figures, ce n’est pas du tout une intention parodique, mais plutôt une sorte d’inquiétante étrangeté, l’installation d’un climat bizarre, poisseux comme un mauvais rêve. La Gelée d’arbre se déploie ainsi quelque part entre le cinéma des frères Coen (on pense bien sûr à Fargo et à Barton Fink) et celui de David Lynch (en particulier Blue Velvet et Sailor et Lula), avec un coup d’œil en coin du côté du Buffet froid de Bertrand Blier.


Du coup, ce qu’il faut privilégier dans le traitement de la pièce, c’est une sorte d’étonnement détaché, de stupéfaction calme des figures face aux “drôles de drames” qui leur tombent dessus (pour Blutsch, les personnages de Clamince et Maxence seraient des lointains cousins du Dead Man de Jim Jarmusch). Les gags improbables des deux héros sont autant de réponses joyeusement désespérées face aux désordres d’un monde qui dérape.


Bien sûr, comme le dit Blutsch lui-même, tout cela doit rester “marrant”. C’est sans doute l’intérêt principal de la pièce que d’imposer à ses interprètes un exercice d’équilibre permanent. Car il s’agit bien ne pas affadir la radicalité du fond en s’attachant uniquement à la forme burlesque, mais de ne pas à l’inverse alourdir le propos en oubliant la légèreté de la comédie. La Gelée d’arbre, un vaudeville noir, en somme...

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