Isonzo est le nom d'un fleuve situé dans une région alpine d'Italie. Donc un élément mouvant.

Tenna est le nom d'une commune des Alpes suisses, située dans le Safiental. Donc un élément stable.

A partir de ces figures, Howard Barker écrit une pièce puissante sur le désir, le voyeurisme, l'impossibilité de dire, les limites de l'amour.

Dans ce texte, deux personnages : Tenna, une jeune fille de 17 ans qui se marie avec un homme de 100 ans : Isonzo. C'est pour le personnage d'Isonzo son douzième mariage. Ils sont tous les deux aveugles. Le mariage vient d'avoir lieu. Il reste à vivre la nuit de noces. Pour cela, ils se cachent et dans une conversation où mensonges, vérités, provocations et aveux amoureux se rencontrent, ils vont développer leur érotisme si particulier. Pour ces aveugles, le seul fantasme possible devient le voyeurisme, ce qui n'est pas le moindre paradoxe de ce texte.

Par ce dialogue violent et érotique, Howard Barker pose la question de la perception par l'être humain de son propre corps : c'est dans le regard que l'homme, à la fois corps perçevant et corps perçu se retrouve. Comment être lorsqu'on ne voit pas et qu'on n'est pas vu ?

La réponse des personnages sera l'exacerbation du corps, celui qui ne peut être vu mais qui doit tout de même être montré, le corps sera entendu, senti et Isonzo et Tenna vont vivre leur première et dernière nuit comme une bataille où le plaisir est l'enjeu final.

Guillaume Dujardin