theatre-contemporain.net artcena.fr

Accueil de « Les Visionnaires »

Les Visionnaires

mise en scène Elise Marie

: Un texte baroque extravagant

« Et tous les jours nous voyons parmi nous des esprits semblables (visionnaires, chimériques), qui pensent pour le moins d'aussi grandes extravagances, s'ils ne les disent. »
Jean Desmarets de Saint-Sorlin


Les Visionnaires de Jean Desmarets de Saint-Sorlin est une pièce sur la folie, non sur cette pathologie qui peuple les asiles et maisons de santé, mais sur cette folie ordinaire quoique profonde que nous côtoyons parfois, qui nous guette encore, pas dans ces proportions, mais par petites touches, au quotidien, dans la rue, le métro, au sein de notre entourage. Cette pièce pousse en effet jusqu'au bout les logiques farfelues, aveugles, narcissiques qui nous entourent souvent, afin de mieux en exprimer le ridicule, le grotesque, l’absurde. « Toutes ces folies, bien que différentes, ne font ensemble qu'un sujet » écrit Desmarets de Saint-Sorlin dans un avertissement.


Ecrite et représentée en 1637, orée de l'âge classique, cette comédie encore baroque en cinq actes et en alexandrins a tout de suite été un succès. Elle entre au répertoire de la Comédie-Française le 30 septembre 1680, jouée par la troupe du Théâtre de Molière. Elle inspira même Molière pour les personnages de Bélise et d'Armande dans Les Femmes Savantes.


Dans cette pièce étonnante, un père de famille indécis à l’extrême (dans notre projet, c’est une mère) cherche à marier ses trois filles un peu dérangées, (l’une est amoureuse d’elle-même - « ô mon père pourquoi me fîtes-vous si belle ! »- ; l’autre se consume d'amour pour d’Alexandre Le Grand et passe les jours à se repaître de ses exploits ; la troisième ne vit que pour le théâtre) à quatre prétendants tout aussi farfelus, nombrilistes et auto-satisfaits : un capitaine du genre Matamore ; une âme sensible, idéaliste transi qui s'évanouit à la simple idée d'une belle femme ; un poète pédant en mal de reconnaissance ; un « crève-la-faim » prétendument fortuné qui n'est qu'un mystificateur. Tous ces personnages hauts en couleur se succèdent et forment un défilé, une brochette de solitudes gratinée et jubilatoire. On croit parfois discerner un peu de raison chez un personnage, lorsqu’un autre s’exprime dans toute sa fureur, mais il dérape bientôt à son tour dans la folie la plus totale dès qu’il prend la parole, et nous fait paraître le second parfaitement raisonnable. Tous sont des antihéros rivalisant de ridicule : des peureux, des loufoques donc, qui ont des visions, d’où le titre magnifique donné à cette comédie en 1637, Les Visionnaires… Une comédie virtuose donc, complexe, baroque, où la vérité est indissociable du mensonge, comme le réel l’est du rêve ou du cauchemar, et la vie, de la mort. La fin de la pièce, douce-amère (ou « grave-douce » pour reprendre l'oxymore du poète extravagant) est aussi celle des illusions de tout ce petit monde, et celle de l'abdication complète de la raison devant la folie.

imprimer en PDF - Télécharger en PDF

Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné, Je me connecte Voir un exemple Je m'abonne

Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.