Dans ce récit, Annie Ernaux s’adresse à sa sœur disparue deux ans avant sa naissance, morte à six ans, emportée par la diphtérie. Cette sœur dont elle découvre l’existence passée en entendant les bribes d’une conversation entre une cliente et sa mère dont les paroles “Elle était plus gentille que celle-là” se gravent à jamais dans sa mémoire.
Le silence retombera à nouveau sur ce secret. Mais même le silence contribue à forger un récit qui donne des contours à cette petite fille morte… Elle, l’enfant vivant, dormira dans le lit de la sœur disparue, son cartable deviendra le sien, elle mettra ses pas dans les siens. Au fil de son existence, elle se construit contre elle, entre réel et imaginaire, au gré des objets, des photos, des paroles échappées.
Elle, Annie, la petite fille d’un couple brisé par la guerre et la perte d’un enfant, et l’Autre fille, l’enfant d’avant la tragédie et la guerre, l’enfant de la joie et du bonheur perdu. Annie Ernaux interroge dans ce récit le pourquoi du silence et son propre désir d’adresser une lettre à cette sœur disparue : « Peut-être que j’ai voulu m’acquitter d’une dette imaginaire en te donnant à mon tour l’existence que ta mort m’a donnée. Ou bien te faire revivre et remourir pour être quitte de toi de ton ombre, t’échapper. »