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L'Atelier volant

+ d'infos sur le texte de Valère Novarina
mise en scène Valère Novarina

: À propos de L’Atelier volant

Valère Novarina met en scène pour la première fois L’Atelier volant, sa toute première pièce, écrite en 1971 et créée à Suresnes en 1974 dans une mise en scène de Jean Pierre Sarrazac et des décors de Gauvin. Un trio patronal (Monsieur Boucot, Madame Bouche, le Docteur) mène la danse ; en face, cinq employés fabriquent des objets inidentifiables sur un rythme de plus en plus rapide ; et bientôt, apparaît, surgit sous la « lutte des classes », souterrainement, puis soudain au grand jour : la lutte des langues. Tous les thèmes qui se tressent dans les oeuvres de Valère Novarina se croisent dans cette pièce à l’état primitif. Le langage est une onde, la pensée un accident du rythme. Vertiges, syncopes, bribes, litanies, pulsations ; émoi et dispersion des sens. Tout est entre les mains des acteurs : un octuor de solistes habitués aux travaux périlleux...

« Le naturel vêtement des fesses, joues de la muette d’en bas, masque l’extrémité du tube digestif. L’autre, la seconde, la bavarde, est dans la tête, qu’elle perce. Elle peut parler, si la mâchoire veut bien s’ouvrir. Les lèvres (muscles) et les dents (ossements) entourent son vide qui n’a pas de nom. Le corps s’étend entre les bouches, la silencieuse et celle qui parle. Ce sont les mêmes muscles du ventre qui, pressant boyaux ou poumons, nous servent à déféquer ou à accentuer la parole. Les membres (deux porteurs et deux appelants) permettent soit de mouvoir le corps parlant vers d’autres bouches ou hors d’atteinte, soit d’agripper d’autres corps au passage pour qu’ils chutent.


L’acteur, dans sa dépense instantanée, il double, il triple le régulier battement sanguin, le circuit des liquides, tous les échanges à l’extérieur. Il meurt jeune. Musique, musique ! C’est le théâtre, un riche fumier. Lieux de l’accumulation du dépôt des restes inanilés de toutes représentations des postures du corps de l’homme. Ou chant hurlant des matières vives, concert animal.


L’Atelier volant est une intense circulation de marchandises (dont pas mal sont invisibles, dont pas mal sont en paroles) autour de l’agité Boucot. Faut tout de même reconnaître que pour un cancéreux, il a encore le coup de fourchette solide… Boucot, sa femme et le Docteur, usant les forces, les mots qui restent, parlent plus vite, arrivent plus tôt, marquent le point, courent en coulisse reprendre du souffle, valsent encore bien leurs derniers tours ; les autres, six employés toujours qui chutent, toujours qui meurent, toujours renaissants, sont des réservoirs à violence, poussés par quoi, dans l’avancée, découvrent d’la langue nouvelle à force de pas savoir qui parle.


La matière est abondante, le spectacle est invisible, le récit est taciturne, la dépense est continue. Boucot radote, parle du cerveau (c’est la plus molle partie des têtes) ; les autres, ils branchent leurs bouches au trou profond. Lutte des langues. C’est une Economie et ce qui la renverse. Ca va la renverser. Activons la chute du système de reproduction en cours ! Et saluons au passage Jacques Sallebert, directeur de la Radiodiffusion française, qui a trouvé bon d’interdire la diffusion de L’Atelier volant le 22 avril 1972, parce qu’on était à la veille d’un important référendum. La classe dominante a eu chaud ! »

Valère Novarina

06 juillet 1973

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