Fritz Bauer, magistrat sous la République de Weimar, fut arrêté en 1933 et déporté au camp de Heuberg pour ses origines Juives. Il réussit finalement à émigrer au Danemark puis en Suède et ne revint en Allemagne qu’en 1949. Après avoir été Procureur général à Braunschweig, ce n’est qu’en 1956 qu’il fut nommé Procureur général à Francfort. A partir de ce moment là, il se fixa comme priorité des poursuites contre un certain nombre de nazis de haut rang « disparus ».

Fritz Bauer fournit aux Mossad les moyens de mettre la main sur Eichmann et de lui faire un procès spectaculaire, en contournant le gouvernement allemand, alors que de 1948 à 1952 personne en Israël n’avait encore entamé la chasse aux nazis.

Mais la plus grande bataille judiciaire que mena Fritz Bauer se livra autour du procès de quelques subalternes du camp d’Auschwitz qui se tient d’octobre 1963 à août 1965 à Francfort, devant cent cinquante journalistes du monde entier.

Et pourtant la majorité du peuple allemand ne voulait plus de procès contre les criminels nazis. L’une des particularités essentielles de ce procès, outre sa durée et la quantité d’informations qu’il recèle, était que des allemands y jugeaient des allemands. Ce qui le rend éminemment problématique.

La plupart des procès que Fritz Bauer mit sur pied dérangeaint le personnel politique en place. Il fallut des années pour que le chancelier Adenauer accepte de rendre justice aux résistants anti-nazis. Bauer ne reculait devant aucune charge de travail, ce qui entraînait parfois une certaine lassitude parmi ses collaborateurs. La liste des bourreaux que le procureur de Francfort a tenté de clouer au pilori de la justice est infinie. Il est certain qu’aucune épreuve ne lui a été épargnée, et qu’il a été poursuivi d’une haine féroce, à la mesure de sa volonté de faire aboutir la justice et le droit.

J’ai tenté de contribuer à l’élaboration d’un système de justice démocratique en Allemagne, à la condamnation, cohérente et légale, des injustices nazies ainsi qu’à la réforme du droit pénal. Mais j’étais une figure controversée en raison de mon engagement sociopolitique et dans le système judiciaire allemand de l’après guerre, je vivais comme en exil.
Extrait du spectacle, Fritz Bauer…