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L'École des femmes

+ d'infos sur le texte de  Molière
mise en scène Jean-Marc Chotteau

: Présentation

par Jean-Marc Chotteau

« Il est des rôles que tout acteur souhaite, me semble-t-il, incarner. Pour moi, Arnolphe faisait depuis longtemps partie de ceux-là. Déjà au Conservatoire il me faisait rêver. Mais il me fallait attendre quelques dizaines d’années pour pouvoir approcher l’interprétation de ce vieux barbon séquestrant une jeune fille d’au moins vingt ans sa cadette, différence d’âge qui était celle-là même de Molière et d’Armande, sa très jeune femme, qui interprétait Agnès auprès de lui, qui était Arnolphe. Sans nul doute Molière devait connaître à la fois les transports du jeune et séduisant Horace, dont Agnès tombe innocemment amoureuse, et les affres de la jalousie du bourgeois tyrannique. C’est cet aspect autobiographique, qui confère au rôle son ambivalence, sa complexité, son jeu qui oscille du plus parfait ridicule au pathétique le plus profond… Quel régal !


Mais le seul plaisir de jouer un tel personnage ne suffit pas à décider un metteur en scène. Il lui faut d’autres motivations, moins personnelles, liées aux émotions, aux rires, en un mot au plaisir que la pièce suscitera chez le public, mais surtout aux questions qu’elle éveillera chez lui, sur son temps, sur ses mœurs, ses passions ou ses colères.


Et, sans nul doute, L’École des femmes se fait entendre aujourd’hui comme jamais. Voilà donc 356 ans, un homme de génie de 42 ans nommé Jean-Baptiste Poquelin se mit à rire de ses propres tourments conjugaux mais surtout de lui-même, en dénonçant l’état de servitude où les hommes, imprégnés d’une conception patriarcale du mariage, ont tendance à tenir leurs femmes, faisant d’elles leur objet, leur possession, craignant qu’elles ne s’émancipent, s’instruisent, ou se rebellent. En écrivant et en jouant Arnolphe, Molière le « balance » sans ménagement aux yeux de son public, qui s’esclaffa, s’indigna et, certainement, pensa tout bas ce qui ne s’écrivait pas encore « hashtag moi aussi... »


Il est temps de ne plus penser tout bas et de parler haut. Molière le fait et ma mise en scène veut s’en faire l’écho, sans gommer le poids encore tristement actuel des religions comme freins à l’émancipation féminine. N’est-ce pas sur le modèle des dix commandements, que Dieu édicte à l’attention du peuple Hébreu, qu’Arnolphe fait lire à Agnès son catéchisme du mariage ? N’emploie-t-il pas le langage du terroriste quand il promet l’enfer et ses « chaudières bouillantes où l’on plonge à jamais les femmes mal vivantes ?  »


Mais, pour servir au plus haut niveau d’exigence ce chef d’œuvre, encore fallait-il répondre à une autre exigence : celle de pouvoir s’entourer d’une équipe solide, brillante oserai-je dire, capable de saisir au plus profond la pensée de Molière, de dire ses alexandrins dans un respect formel qui n’exclut pas le souci de le faire entendre à un public d’aujourd’hui, de se sentir à l’aise dans le basculement incessant de séquences franchement comiques et d’autres aux accents tragiques.


J’ai trouvé cette équipe, comédiens, scénographe, éclairagiste, et je peux donc oser m’attaquer à ce monument de l’histoire du théâtre français dont j’ai eu la chance de voir ou d’entendre une multitude d’interprétations aussi différentes que celles de Jouvet, Roussillon, Galabru, Vitez, Bezace, Schiaretti… Sans avoir la prétention d’ajouter la mienne à une longue liste de noms prestigieux, je veux désormais apporter sur cette pièce mon propre regard, celui d’un homme reconnaissant vis-à-vis de celui qui ouvrit la voie à ce théâtre « qui corrige les mœurs en faisant rire » et toucher : Molière. »

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