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: Point(s) de repères

Ainsi, Kiss & Cry se déplie au fil de saynètes et de tableaux à la gaucherie savamment dosée, artefacts d’art brut qui relèvent au contraire d’un savoir-faire consommé pour traduire l’innocence perdue du regard de l’enfance.

Dans Kiss & Cry, la représentation du Monde ne se v eut pas idéale, proportionnée. Elle est composite, éruptive, accidentelle, fruit d’un assemblage antinaturaliste, à des lieues de toute idéalisation ou de toute préméditation stylistique : c’est l’hétéroclicité qui fonde cet univers. Comme quand l’enfant joue et qu’il fait feu de tout bois pour engendrer de l’imaginaire. Les proportions se télescopent, faisant fi des points repère et des points de fuite. L’archétype servira dès lors de balise du sens : chaque élément de décor désignant l’objet de façon générique dans ce carambolage d’échelles de grandeurs et de provenance (la maison vaut pour toutes les maisons, l’arbre pour tous les arbres).
Ici, avec la complicité bienveillante du spectateur, l’on use et abuse des trompes l’oeil, des illusions d’optique. À l’heure où triomphe l’imagerie de synthèse, Kiss & Cry se révèle manifeste poétique qui tient du Méliès.


« Où vont les gens qui disparaissent ? » Justement, ils s’effacent dans ces jeux d’escamotage et de chausse-trappes, ces trucages de farce et attrapes d’un petit monde joyeusement bordélique et candide.
Mais qu’on ne s’y trompe pas Kiss & Cry recèle sa dose de venin, charrie son lot de blessures, infuse sa sourde décoction de mélancolie et d’angoisses. La pièce est certes le véhicule d’une poétique romantique et nostalgique, mais peut tout aussi bien révéler subitement sa brutalité. Sa cruauté aussi. Froide et sans affect, de l’ordre du constat. D’une nature identique à celle de l’enfant qui arrache méthodiquement les ailes de l’insecte. L’humour n’est jamais loin non plus. Que des mains soient les acteurs de ces événements, tantôt poignants tantôt graves ou même spectaculaires, confère cocasserie et surréalisme à la pièce, et permet la dédramatisation. L’incongru devient la norme, le pathos est tenu en respect, à distance.

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