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Illusions comiques

+ d'infos sur le texte de Olivier Py
mise en scène Olivier Py

: Molière et L’Impromptu de Versailles

Le titre de la pièce d’Olivier Py rend hommage, de l’aveu même de l’auteur à l’«étrange monstre» de Pierre Corneille : L’Illusion comique.


La pièce du dramaturge baroque apparaît comme une œuvre inclassable, qui fait fi des genres communément admis au XVIIe siècle : la comédie et la tragédie. La scène qui suit, qui clôt la pièce, est un vibrant éloge de l’art théâtral et de ceux qui le pratiquent.


Mais la filiation sans doute la plus remarquable des Illusions comiques est celle de l’Impromptu de Versaillesde Molière.


L’impromptu trouve son origine dans la commedia dell’arte, sous le nom de commedia all’improviso : il se développe autour des notions de soudaineté et de rapidité, de spontanéité et d’improvisation, voire même de répétition théâtrale.


L’impromptu tel que Molière en définit pour la première fois le genre désigne donc une fausse répétition, feinte ou fictive mais néanmoins écrite, fixée sur la scène et sur le papier, en présence et sous l’autorité de l’auteur ou du chef de la troupe, au cours de laquelle les acteurs expriment leurs doutes en même temps que leurs convictions sur quelques grands ou menus sujets d’esthétique théâtrale, d’art du jeu ou de la représentation, voire, dans certains cas plus contemporains, d’idéologie ou de politique culturelle. La scène qui suit ouvre L’Impromptu de Versailles et présente la troupe de Molière en train de travailler : il y est question de la polémique suscitée par L’Ecole des femmes, et met en scène les comédiens de la troupe de Molière.



(...) MADEMOISELLE BÉJART : Mais puisqu’on vous a commandé de travailler sur le sujet de la critique qu’on a faite contre vous, que n’avez-vous fait cette comédie des comédiens, dont vous nous avez parlé il y a longtemps? C’était une affaire toute trouvée et qui venait fort bien à la chose, et d’autant mieux, qu’ayant entrepris de vous peindre, ils vous ouvraient l’occasion de les peindre aussi, et que cela aurait pu s’appeler leur portrait, à bien plus juste titre que tout ce qu’ils ont fait ne peut être appelé le vôtre. Car vouloir contrefaire un comédien dans un rôle comique, ce n’est pas le peindre lui-même, c’est peindre d’après lui les personnages qu’il représente, et se servir des mêmes traits et des mêmes couleurs qu’il est obligé d’employer aux différents tableaux des caractères ridicules qu’il imite d’après nature ; mais contrefaire un comédien dans des rôles sérieux, c’est le peindre par des défauts qui sont entièrement de lui, puisque ces sortes de personnages ne veulent ni les gestes, ni les tons de voix ridicules dans lesquels on le reconnaît.


MOLIÈRE : Il est vrai ; mais j’ai mes raisons pour ne le pas faire, et je n’ai pas cru, entre nous, que la chose en valût la peine ; et puis il fallait plus de temps pour exécuter cette idée. Comme leurs jours de comédies sont les mêmes que les nôtres, à peine ai-je été les voir que trois ou quatre fois depuis que nous sommes à Paris ; je n’ai attrapé de leur manière de réciter que ce qui m’a d’abord sauté aux yeux, et j’aurais eu besoin de les étudier davantage pour faire des portraits bien ressemblants.


MADEMOISELLE DU PARC : Pour moi, j’en ai reconnu quelques-uns dans votre bouche.


MADEMOISELLE DE BRIE : Je n’ai jamais ouï parler de cela.


MOLIÈRE : C’est une idée qui m’avait passé une fois par la tête, et que j’ai laissée là comme une bagatelle, une badinerie, qui peut-être n’aurait point fait rire.


MADEMOISELLE DE BRIE : Dites-la-moi un peu, puisque vous l’avez dite aux autres.


MOLIÈRE : Nous n’avons pas le temps maintenant.


MADEMOISELLE DE BRIE : Seulement deux mots.


MOLIÈRE : J’avais songé une comédie où il y aurait eu un poète, que j’aurais représenté moi même, qui serait venu pour offrir une pièce à une troupe de comédiens nouvellement arrivés de la campagne. “Avez-vous, aurait-il dit, des acteurs et des actrices qui soient capables de bien faire valoir un ouvrage, car ma pièce est une pièce. - Eh ! Monsieur, auraient répondu les comédiens, nous avons des hommes et des femmes qui ont été trouvés raisonnables partout où nous avons passé. - Et qui fait les rois parmi vous ? - Voilà un acteur qui s’en démêle parfois. - Qui ? ce jeune homme bien fait ? Vous moquez-vous ? Il faut un roi qui soit gros et gras comme quatre, un roi, morbleu! qui soit entripaillé comme il faut, un roi d’une vaste circonférence, et qui puisse remplir un trône de la belle manière. La belle chose qu’un roi d’une taille galante ! Voilà déjà un grand défaut ; mais que je l’entende un peu réciter une douzaine de vers.” (...)


Molière, extrait de L’Impromptu de Versailles



Il convient en outre de rattacher la tradition ludique, humoristique et polémique des impromptus à une thématique plus large et plus vaste : celle du théâtre dans le théâtre, de la mise en abyme de la scène, de l’enchâssement des fictions ou encore du méta- théâtre (c’est-à-dire le discours ou le commentaire sur le théâtre, au coeur même du texte théâtral).


On peut se référer dès lors à la longue tradition qui utilise ce procédé :


Bibliographie


Aristophane, Les Grenouilles
Shakespeare, Hamlet et Le Songe d’une nuit d’été
Corneille, L’Illusion comique
Marivaux, Les Acteurs de bonne foi
Pirandello, Six personnages en quête d’auteur et Ce soir on improvise

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