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Graves épouses / Animaux frivoles

mise en scène Guillaume Dujardin
Création à partir des textes Shallow animals de Howard Barker, Deep wives de Howard Barker,

: Note d'intention

« Je n’aime pas les situations naturalistes. J’aime les évènements qui relèvent de la métaphore et non du lieu commun » Propos de Barker cités par Catherine Itzin. Stages in the Revolution. London : Methuen, 1980, p. 251.


Quand le monde aura brûlé, il restera des femmes. Deux. Peut‐être.
Leur séduction. Les regards jaloux entre elles.
L’image qu’elles se font du désir de l’homme pour elles.
Du désir du mari d’une d’entre elle pour celle qui n’est pas sa femme.
Du désir de l’épouse de voir son mari avec l’autre femme.
Une image matérialisée en robot, en chien quémandeur.
Une frustration.
Une image comme un manque, reflet de leur propre désir.
Nous sommes sur le terrain de l’imaginaire, de tous ses décombres.
Un endroit où le pouvoir politique – économique, social – n’a plus lieu d’être.
Un no man’s land calciné.
Du passé ne reste que la relation entre ces deux femmes.
Une comtesse et sa servante. Anciennement.
Et ce mari – celui de la servante – dont elles rêvent le désir.
Peut‐être.
C’est une attente. C’est érotique. C’est vacant.
Si des fleurs poussaient, on se dit qu’elles seraient noires.
Dehors, des cris d’oiseaux.
Et un hurlement effroyable. Par moment.
Des cendres. Un chien mécanique.
Après un incendie. Après une guerre. Après.
Une catastrophe. Un renversement. Des « changements ».
On dirait un autre côté du miroir intime, cruel. Une île des esclaves du désir.
Des cendres. Toujours. Des objets animés.
Dehors, des oiseaux cognent les murs. Un hurlement se répète.


Depuis les années 1970, Howard Barker ne cesse d’écrire pour le théâtre mais aussi pour la radio, la télévision, le théâtre de marionnettes, le cinéma, l’opéra… Au sein de ce qu’il nomme et théorise le « Théâtre de la Catastrophe », il produit une oeuvre prolifique dont la mécanique de ressassement fait émerger les propres obsessions et variations. Il faut entendre la « catastrophe » dans son sens étymologique, c’est un renversement : des modèles théâtraux (aristotélicien ou brechtien) ; des valeurs (éthiques, esthétiques)…
Débutant par des pièces satiriques, Howard Barker semble s’échapper peu à peu du politique, contestant la loi naturaliste qui règne au théâtre ou encore, ce qu’il nomme le « manichéisme » de Brecht ou de Bond. Pour lui, le théâtre n’est ni leçon, ni divertissement ; il est expérience de la douleur et de la beauté qu’elle révèle. Retravaillant le genre de la tragédie, ce théâtre a pour ambition de dire la complexité de l’homme.
Au fil des années, une nouvelle écriture a pris forme, métaphorique et exigeante, une écriture dans laquelle, dernièrement, semble s’opérer, comme le formule Elisabeth Angel‐Pérez en empruntant le terme deleuzien, une sorte de « reterritorialisation » du politique dans l’intime et le charnel.


Deux extraits pour observer à la fois l’obstination et les variations du théâtre de Howard Barker, ce théâtre qui se nomme « catastrophe » et se définit récemment, comme art du théâtre.


  •  « Clarté
  • Sens
  • Logique
  • Et cohérence
  • Rien de tout cela
  • Rien »

Prologue de The Bite of the night, La Morsure de la nuit, trad. Ivan Bertoux, inédit, in Arguments pour un théâtre de Howard Barker, éd. Les Solitaires intempestifs, 2006.


  • « Lexique pour l’art du théâtre
  • Infini
  • Sans fonction
  • Intraitable
  • Nulle Part
  • Imprévisible
  • Illogique
  • Arbitraire
  • Ne sont‐ce pas les attributs de la mort ? »

Howard Barker, La Mort, l’unique et l’art du théâtre, éd. Les Solitaires Intempestifs, Besançon, 2008, pp.108‐109.

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