theatre-contemporain.net artcena.fr

Gagarin Way

+ d'infos sur le texte de Gregory Burke traduit par Dominique Hollier
mise en scène Bertrand Bossard

: Entretien avec Bertrand Bossard

Propos recueillis par Hervé Pons

Acteur “sérieux” chez Nordey, Fisbach ou Ruff, Bertrand Bossard semble néanmoins être né pour la comédie. Et pas n’importe laquelle : la sienne, qui mélange humour et élégance, autodérision et intelligence avec un poil de flegme tout britannique !


Après Incredibly Incroyable et Mon Ile déserte, où vous étiez à la fois auteur et acteur, vous mettez en scène une pièce écossaise. C’est un nouveau défi ?


Ce qui m’intéresse dans ce métier, c’est de faire des choses qui ont certes à voir entre elles, mais qui sont différentes. Je ne pourrais pas être seulement acteur ! J’ai créé Incredibly Incroyable pour me mettre en porte-à-faux par rapport à mon métier (je ne jouais alors que des rôles très sérieux) et appréhender une autre manière de travailler. J’ai ainsi pu découvrir le plaisir de l’écriture, celui d’être seul en scène et celui de voir que, ce que j’écrivais et jouais, plaisait au public. Dans la foulée, j’ai donc écrit Mon île déserte et me suis lancé dans l’écriture d’une pièce sociale. C’est là, qu’au festival d’Edinburgh, j’ai découvert, la pièce de Gregory Burke, Gagarin way. Comme elle racontait tout ce que je souhaitais écrire, j’ai décidé de la mettre en scène et de laisser tomber ma plume pour le moment !


C’est une histoire drôle ?


Drôle et intelligente. Et c’est parce que c’est intelligent, qu’on a le droit de rigoler deux fois plus ! La pièce raconte l’histoire de deux ouvriers conscients qu’un plan social va être mené dans leur usine. Telles les brigades rouges, ils décident de kidnapper le japonais qui fait l’audit de leur usine et de le tuer, en guise de protestation. Après moult aventures, ils sortent enfin le japonais du sac dans lequel ils l’ont enfermé et là, oh stupeur et tremblements, ils découvrent que leur homme est un écossais comme eux mais aussi que leur entreprise n’est plus une boite japonaise mais américaine ! En somme, beaucoup de bruit pour rien et, en plus, il faudra bien reprendre le boulot demain !


Comment allez-vous vous emparer de ce texte ?


Je vais essentiellement travailler sur la rythmique et la double lecture, pour que le sens profond parvienne au spectateur à travers les blagues de la conversation usuelle britannique. Je voudrais que les spectateurs aient l’impression d’être assis à la même table que les acteurs. Je souhaite également faire un travail sur l’image, via des écrans vidéos, et raconter comment la société contemporaine peut dépeindre des personnages juste avec un tube cathodique.


Le fait d’écrire vous-même a-t-il changé votre regard sur l’écriture des autres ?


Je ne lis plus les pièces de la même façon. Il me semble que je saisis mieux ce que les dramaturges ont mis dans leurs textes, les doubles sens. Ce qui m’importe alors, c’est de monter des textes dans toute leur ampleur, de s’autoriser à aller au fond. Et aussi, de soutenir des auteurs qui continuent à pousser les limites, à expérimenter de nouvelles formes. Il y a des auteurs qui ont trouvé un truc et qui le filent toute leur carrière : je ne suis pas de ceux-là et je ne filerai rien avec des gens qui pensent ainsi.


Vous avez rencontré l’auteur ?


Oui, c’est un homme de trente-six ans, qui a peut-être été hooligan (rires). C’est un fan de théâtre, de cinéma, de jeux vidéos et de football : en somme, ce que la société peut désormais créer de plus normal ! À un moment de sa vie, il a pris une carte de bibliothèque pour se cultiver. Il y a deux ans, il écrit cette pièce et l’envoie au festival d’Edinburgh où elle est aussitôt mise en scène et constitue LE succès du festival. S’en est suivi le National Theater de Londres pendant six mois et six mois de plus dans le privé !


Pour votre mise en scène, vous avez choisi des acteurs d’exception, Samy Bouajila notamment.


Samy est un bon acteur et c’est aussi un ange ! Il est beau et cela fait encore plus peur d’imaginer qu’il jouera le rôle principal, celui d’Eddy, le désabusé qui va mener tout le monde à la baguette dans cette galère ! Il est mi-ange mi-démon. Peu de monde sait que Samy est un véritable acteur de théâtre : il a commencé sur les planches avant de faire du cinéma. Et puis, il y a Fred Ulysse, qui joue dans le dernier film de Chéreau, qui m’impressionne énormément et avec qui j’ai travaillé en tant qu’acteur dans L’annonce faite à Marie de Claudel. Et deux autres bons acteurs, Frédéric Solounto et Thomas Gornet, avec lesquels j’ai déjà joué. C’est formidable qu’ils aient accepté de me suivre dans ce projet un peu fou ! Et il y a dans la pièce un acteur d’exception qui ne doit pas se rater : l’humour !


Est-ce à dire qu’il y aura dorénavant un humour français au même titre que l‘humour anglais


Les Français ont de l’humour ! Ils comprennent et aiment l’humour anglais, c’est donc qu’ils en sont capables… d’humour !

imprimer en PDF - Télécharger en PDF

Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné, Je me connecte Voir un exemple Je m'abonne

Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.