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Froid

+ d'infos sur le texte de Lars Norén traduit par Katrin Ahlgren
mise en scène Simon Delétang

: « Die Mother fucker, Die »

Pour un Théâtre de l’effroi

À l’origine de cette pièce, un fait divers, un drame ayant ôté la vie à de jeunes gens, dont Lars Norén s’est emparé pour interroger le rapport de la jeunesse au monde et aux autres. Une jeunesse brimée, rageuse et abandonnée qui se tourne vers l’extrême violence et l’extrême droite pour s’affirmer.


Un constat sans jugement, sans artifice, des questions posées à nous tous auxquelles Lars Norén n’apporte aucune réponse si ce n’est celle de l’incarnation et de la représentation. Il est peut-être encore trop tôt pour y répondre, à moins qu’il ne soit déjà trop tard pour réagir.


Qu’est-ce qui pousse ces jeunes tout juste sortis de l’enfance à tuer pour voir ce que cela fait ? Á tuer pour affirmer ses idées raciales ?


Froid nous confronte à trois jeunes nationalistes suédois, trois chiots enragés et imbibés mais non dénués d’intelligence, qui, pour fêter la sortie des classes, s’amusent à voler le temps précieux d’un de leur camarade d’origine coréenne. Unité de temps, de lieu et d’action : la tragédie se met en place. Chacun défend ses idées jusqu’à ce que la haine des uns prenne le dessus et se déchaîne contre la victime expiatoire d’une idéologie nauséabonde et passéiste, sans espoir de salut.


Lars Norén nous livre un théâtre à l’état brut, nourri d’une tension permanente qui joue avec nos nerfs et notre conscience. Cet état des lieux très réaliste de l’horreur idéologique et de la détresse de la jeunesse est absolument nécessaire et vital à faire entendre et à faire incarner par des acteurs. Que de ce choc naisse la réflexion, que le théâtre soit encore le lieu de l’agitation des consciences et de l’éveil des sens.


Un théâtre qui, tout en nous anéantissant suscite notre esprit critique est la quintessence de ce que doit être la tragédie contemporaine.


Quand le fait divers devient matière théâtrale, la poésie de l’horreur surgit sournoisement comme un calque de nos faiblesses et de nos peurs.


Nous ne jouerons pas le réalisme de l’âge des personnages, étant entendus qu’il faut des acteurs aguerris, engagés et lucides, afin d’incarner l’humanité de ces nouveaux bourreaux et par cette distance salvatrice, rappeler que nous sommes au théâtre. La tragédie est dans les mots et dans les actes, et en grand dramaturge qu’il est, Lars Norén transcende la réalité pour mieux nous achever.


L’effroi que suscite cette pièce à la lecture est le même que celui que je cherche pour les spectateurs. Nul ne peut sortir indemne de cette tragédie.


Que de la confrontation de ce drame naisse une réflexion sur l’héritage laissé aux plus jeunes générations, sur la faillite d’un système, et sur le grand absent de ce texte, le mot « Amour ».


Puisse le pouvoir cathartique de la tragédie les libérer de leurs maux. « Il n’est jamais trop tard pour prévenir la mort de l’Europe.»*


*Howard Barker

Simon Delétang

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