Les départements français ont en charge la protection de l’enfance et à ce titre l’accueil et l’accompagnement des mineurs non accompagnés (MNA). Dans l’attente de la certification de leur minorité, expertise médicolégale s’appuyant sur l’Atlas de Greulich et Pyle – examens de la main, du poignet, des parties génitales, du système pileux et de la dentition – Yâlhmuthu, Singam, Dev, Arun, Hari, Lekha, Samuel, Lochan, Nambi, Awa, Abdoulaye, Moussa, Moïse, Marie, Issa, Ali, Saman, Buddha, Mamadou, Ousmane, venus de pays lointains, sont réunis pour un temps dans les murs d’un ancien centre de colonie de vacances perdu au milieu d’une forêt perdue au milieu de nulle-part. Des dizaines de garçons entassés dans des petites chambres pleines de lits superposés, parlant des tas de langues et plus ou moins français, rêvant d’une vie meilleure. Une jeune-fille aussi, la seule à avoir droit à une chambre personnelle et à un verrou sur sa porte, qui veut devenir pâtissière. De ces journées passées ensemble à manger du riz pimenté, à débarrasser la table, à regarder des clips de rap sur l’écran géant du foyer, à apprendre à jouer au cricket sur le terrain de basket avec les pakistanais, à écrire des listes, à raconter la peur des sangliers qui peuplent la forêt ou celle des incertitudes qui font l’avenir, est née l’envie d’écrire deux portraits croisés : celui du directeur du centre et celui d’un jeune mineur isolé mis à l’abri. Des vies que rien ne destinait à réunir, soudainement prises dans les mêmes rouages administratifs d’une hospitalité molle à la française.