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Fabbrica

+ d'infos sur le texte de Ascanio Celestini traduit par Kathleen Dulac
mise en scène Charles Tordjman

: Parole d’auteur

J’ai recueilli des histoires isolées, des fragments qui tournent tous autour du vécu physique de l’usine. Celui qui raconte le travail raconte quelque chose de son propre corps. Même quand il parle du cahier des charges collectif, des litiges syndicaux et de l’article 18, il emploie un vocabulaire qui fait référence au corps. Comme si, pour parler de ce qui est arrivé, il fallait transposer dans un langage qui a pour référence la maladie et la santé, la beauté et la difformité, la force et la faiblesse. Apprendre le métier en usine signifiait regarder les autres qui travaillaient et puis répéter les gestes qu’ils avaient vu faire. Pour la plupart des ouvriers, il n’y a jamais eu un moment pendant lequel leur travail était décrit par des paroles. Le corps même mémorisait le travail. C’est pour cela qu’au moment où on demande à un ouvrier de raconter son propre travail il est déstabilisé, parce que le travail il l’a toujours réalisé sans beaucoup en parler. Alors plus que de raconter son travail, cet ouvrier commence à effectuer les gestes que la mémoire de son corps connaît et reconnaît.
Je m’appelle Ascanio Celestini, fils de Gaetano Celestini et Comin Piera. Mon père répare les meubles, vieux ou anciens. Il est né dans le quartier du Quadraro et quand il était gosse il a commencé à travailler comme apprenti à San Lorenzo. Ma mère est de Tor Pignattara, elle était coiffeuse dans une boutique où on avait coupé les cheveux au roi d’Italie et à l’époque elle dansait le «liscio». Quand elle s’est mariée avec mon père elle a arrêté de danser. Quand je suis né elle a arrêté d’être coiffeuse. Mon grand-père paternel était charretier à Trastevere. Après un accident il est devenu invalide du travail, il est allé travailler au cinéma Iris à Porta Pia. Le matin il nettoyait, l’après-midi et le soir il était masque, et pendant la nuit il était gardien. Sa femme s’appelait Agnese, elle est née à Bedero. Je me rappelle qu’elle fabriquait ses chaussures avec de vieux gants. Mon grand-père maternel s’appelait Giovanni et il était bûcheron avec Primo Carnera. Ma grande-mère maternelle est née à Anguillara Sabazia et elle s’appelait Marianna. Sa soeur, Fenisia, enlevait le mauvais sort et elle racontait des contes de sorcières.

Ascanio Celestini

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