: Vous avez dit « japonais » ?
« Dans ce projet, Aurélie et moi voulions que le corps soit central. Trouver le vocabulaire
gestuel d’un personnage, en faire une partition exacte et riche qui soit porteuse de sens,
d'humour et d’émotions, voilà tout le projet. L’univers de la princesse s’est imposé à nous
sous le terme « japonisant » avec toute la distance et l'humour que le mot peut comporter. La
princesse a de longs cheveux noirs, porte un kimono, marche en glissant sur le sol, comme
elle a vu faire les geishas, se réveille au son d’une musique japonaise, et même sa transe a
quelque chose de japonais. Elle est belle et hiératique, ses émotions sont contenues et
raffinées. Et ce faisant, nous accusons le trait. Elle mange un peu trop délicatement, elle se
déplace de manière un peu trop figée. Si cet excès de délicatesse amuse, il dérange aussi. Cet
emprunt au style japonais nous permet de donner à la princesse la grâce qu'il lui faut, mais il
accuse aussi le caractère stérile de sa vie. Car ce code qui raconte la maîtrise de la princesse
n'est là que pour se fissurer au fur et à mesure du spectacle. Le corps poli et policé de la
princesse va céder sous la poussée du désir, des pulsions. En fin de compte, ce vocabulaire
oriental n'est proposé que comme point de départ, afin qu'il dialogue ensuite avec la chair, la
sauvagerie, l’érotisme.
Ainsi la forme dialoguera avec le brut, l'élégant avec le déjeté. Voilà pourquoi tout, dans le
palais de Blanche, est « japonisant », sans être japonais. Et la princesse n’a évidemment
jamais mis les pieds au pays de Mishima. »
Félicie Artaud
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