theatre-contemporain.net artcena.fr

Accueil de « En attendant Godot »

En attendant Godot

+ d'infos sur le texte de Samuel Beckett
mise en scène Jean-Pierre Vincent

: Note d’intention

Ce qui m’a porté à relire, ou plutôt à lire Godot, c’est le sentiment intime, de plus en plus précis, de l’obsolescence programmée de l’Humanité, de l’intuition d’une « potentielle fin du monde » qui traverse parfois chacune et chacun d’entre nous. Quelle anticipation dès 1948, date de l’écriture de la pièce... Ces deux types – clochards, clowns, philosophes sans Dieu, écho du couple Beckett... perdus dans l’ère du vide à l’époque même de la reconstruction du monde, rencontrant sur une vieille route le Maître et l’Esclave, déchets grotesques du « monde d’avant » ! Même pas tristes, un peu gais parfois, vivants. Ils ne sont pas là parce qu’ils attendent : ils attendent parce qu’ils sont là... Nous sommes tous là, nous en sommes tous là. Il devient passionnant de lire cette tragi-comédie avec nos pensées d’aujourd’hui sur l’état du monde (et du théâtre).
Mais j’aimerais aussi retrouver le moteur d’origine, ce sentiment que Beckett se garde bien d’exprimer de façon directe : qu’on sort des horreurs et des charniers de 39-45, et qu’on entre dans l’ère de la fabrication industrielle de l’humain solitaire : et il faut bien y vivre pourtant... Ce n’est pas du théâtre de l’Absurde, idiote invention ! C’est l’affirmation fragile d’une résistance dans la débâcle. Évidemment, cette tragédie n’est pas morose ! L’héritage clairement avoué des burlesques américains traverse l’histoire de bout en bout : Keaton, Chaplin, Laurel & Hardy... La force comique de Beckett nous évite de visiter son oeuvre comme un musée qui prend la poussière. Godot est une entreprise de destruction du vieux théâtre bourgeois, de ces scénarios, de son naturalisme et de ses effets : c’était une provocation, on a envie de retrouver cela aussi. Mais c’est en même temps un hommage jubilatoire aux lois les plus simples et les plus anciennes de la scène : coulisses à droite et à gauche, entrées et sorties, rampe, toilettes au fond du couloir ! Et tout cela se met à jouer ! J’ai parcouru avidement cette pièce comme une suite formidable de petites scènes très concrètes, espérantes et désespérantes, frappé par son usage radical du silence, par l’ambiance « planétaire » qui règne sur ce paysage. Il ne restait plus qu’à choisir soigneusement mes complices pour ce voyage... Et nous voilà partis...

Jean-Pierre Vincent

imprimer en PDF - Télécharger en PDF

Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné, Je me connecte Voir un exemple Je m'abonne

Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.