: La Pièce
par Julie Deliquet
La parole de Lagarce et ses non-dits : la parole de Lagarce se
prolonge au-delà de ce qui est dit et pose le silence comme
seule retenue avant la vérité.
Travailler sur la difficulté de dire. L’impératif de sincérité.
Trouver le mot, celui qui convient et ne trahit pas. Ne pas déborder.
Parler trop pour ne pas trop en dire. Savoir où les mots
vont, jusqu’où ils vont.
L’illusion de la consolation… Plus on avance dans la pièce et
plus on nous tire en arrière vers ce passé qui les unit.
Ce passé, celui d’Hélène, Paul et Pierre ne m’intéresse pas, c’est
ce qu’il en reste aujourd’hui qui joue.
Le présent prend en otage tous les protagonistes face
à cette vente de la maison. Dans l’écriture de la pièce le silence
et la présence peuvent écraser le discours.
Antoine, Anne et Lise peuvent écraser la vieille histoire, même si
ils nous apparaissent comme victimes d’une situation imposée.
Derniers remords avant l’oubli ce n’est pas les retrouvailles de
Pierre, Hélène et Paul, la pièce traite au présent d’un huis clos
de 6 personnes qui se retrouvent confrontées au passé des uns
qui concerne le futur des autres…
La maison avale, emprisonne et aspire tout ce beau monde
autour d’un repas improvisé. Il faudra assister, mettre sur table
le passé, l’affronter pour mieux le digérer.
Faire le vide… et vendre ?
Le discours est construit comme une nécessité de parole,
un devoir vital pour sauver sa peau.
Il faut convaincre !
Rien n’est quotidien chez Lagarce.
Le personnage, et donc l’acteur, doit obtenir quelque chose de
l’autre, et s’il est en “monologue”, il doit le considérer comme un
dialogue avec lui-même. La pensée avance toujours, la répétition
chez Lagarce nous mène plus loin dans le discours, ce n’est
jamais un référent passé, c’est une marche en plus.
Le travail sur les enjeux et les objectifs de chaque personnage
est primordial.
L’état de départ plante la pièce et laisse part au discours des
uns et à l’écoute des autres.
Qu’est ce qui se joue avant de prendre la parole ?
Qu’est ce qui se joue avant la confrontation ?
Il faut toujours rester vigilant face à cette écriture et prendre
le pouvoir !
Ne pas jouer la conséquence dans Derniers remords avant
l’oubli, on banaliserait le propos.
Il ne faut pas tout attendre de Lagarce, lui-même a ponctué son
discours de « … ».
Dans la première version du texte, il y avait comme des logorrhées
ininterrompues, scandées par des virgules et de rares
points. La version définitive, elle, introduit des paragraphes et
des alinéas.
Après des pages et des pages, l’auteur a essentialisé Derniers
remords avant l’oubli et supprimé des passages entiers avec
pour traces de ces mots effacés, ces fameux « … ».
J’ai souvent dit pendant le travail, il faut désacraliser Lagarce.
Ce n’est pas lui que je veux entendre c’est la voix des acteurs.
Lagarce on peut lui faire confiance, mais nous, nous devons
nous imposer comme une évidence face au texte.
Il faut être insolent avec la langue et prendre le pouvoir pour
passer au plateau.
Il faut s’autoriser et se donner la liberté de trouver des réponses
hors les mots pour s’approprier le discours et le
nourrir d’une vraie sensation et non d’une idée présupposée.
Nous avons abordé les non-dits et les « … » par un travail
d’improvisation collective où l’acteur prend la parole et
le pouvoir de ses propres choix.
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