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Dans le nom

+ d'infos sur le texte de Tiphaine Raffier
mise en scène Tiphaine Raffier

: Note d'intention

par Tiphaine Raffier

L’agriculture est l’un des thèmes principaux de la pièce. L’histoire se passe quelque part à la campagne. Une campagne générale. Une terre d’élevage à la fois archaïque et technologique. Les coordonnées géographiques ne sont pas précisées. Un paysage d’aujourd’hui. Une campagne contemporaine.


Comment représenter l’immensité du paysage au théâtre ? Raymond Depardon explique que pour réaliser Profils Paysans, il s’est davantage intéressé à la langue des hommes qu’aux bottes de foin laissées sur le chemin. Mon point de départ est le même : je pars de la langue. Il y a peu de personnages mais, comme l’écrit l’ethnographe Jeanne Favret-Saada dans Les Mots, la mort, les sorts, « cinq, c’est déjà une société ». La lecture des travaux de cette intellectuelle a été décisive pour l’écriture de la pièce. C’est d’ailleurs en lisant Désorceler que j’ai trouvé l’architecture de Dans le nom. Dans le nom est un thriller psychologique, une enquête. Durant cette enquête, les personnages comme les spectateurs sont priés de trouver le méchant, le coupable. Celui qui fait souffrir Davy et sa sœur, deux pauvres orphelins. C’est le but ultime de nombreuses fictions. C’est le fonds de commerce du cinéma hollywoodien : trouver le méchant. Parce qu’il doit bien y en avoir un. Il doit bien avoir une origine, une cause originelle à toute cette souffrance.


Strengers et Pignarre, dans La Sorcellerie capitaliste, décrivent le capitalisme comme un « système sorcier sans sorciers » : « Un système qui nous frappe de paralysie et d’impuissance en nous confrontant sans cesse à des « alternatives infernales ». « Un dispositif que ses victimes activent malgré elles : c’est cela, la définition d’un système sorcier ! » Le discours des hommes politiques depuis deux bonnes décennies pourrait se résumer à cette phrase : « Je vais vous expliquer les contraintes inexorables auxquelles notre action est soumise ».


Au théâtre, la langue est notre outil. C’est aussi le sujet principal de cette pièce. Le verbe est à la fois porteur du mal et de sa guérison. Les personnages de pouvoir sont ceux qui maîtrisent la langue. Chacun de leur discours est un système complexe auquel il est difficile d’échapper. Dans l’histoire que je raconte, la langue tue. La vérité ne m’intéresse pas. Ce qui m’intéresse, ce sont les brèches. L’invisible. La manière dont une parole devient légitime grâce à ce qu’elle sous-entend, à ce qu’elle ne dit pas, à ce qu’elle occulte. Le langage est une science occulte. Dans le nom n’est pas un réquisitoire politique ; c’est avant tout une métaphore



Pourtant, Jeanne Favret-Saada est formelle : après avoir longuement étudié la sorcellerie paysanne en France, elle n’a eu à faire qu’à des victimes. Elle n’a jamais rencontré de sorciers.

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