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Dans le frigo

mise en scène Clément Poirée
Création à partir des textes Les Bonnes de Jean Genet, Le Frigo de  Copi, Macbeth de William Shakespeare,

: Note d'intention

Tout commence par la solitude. Un homme seul et nu sur son vieux canapé, L., fait face à un frigo, comme une allégorie encore indéchiffrable. On sent la mort qui rôde. On apprendra vite qu’il s’agit du cadeau que lui a fait sa mère pour ses 50 ans. Qu’y a-t-il dans ce frigo ? L. hante son appartement de vieux garçon, comme un ogre son antre. Nous sommes dans une grande pièce défraîchie, le cendrier dégorge de vieux mégots, des cadavres de bouteilles jonchent çà et là la moquette élimée qui fut élégante un jour. Les murs sont tapissés de grandes penderies... C’est une première vision, inquiétante, sombre : le vieillissement avec pour seul interlocuteur une grande boîte froide.


Le plateau est ce lieu où l’on retourne le gant de nos consciences, on y observe l’intérieur à l’extérieur. La scène se fait écrin d’une cérémonie païenne, inquiétante et jubilatoire. Le théâtre a surgi du néant et l’imaginaire prolifère sans bornes. Où cela va-t-il finir ? Est-ce que cela peut, est-ce que cela doit finir ? La boîte de Pandore est grande ouverte et la porte de ce mystérieux frigo, qui chez Copi restait close, s’ouvre alors sur d’autres figures inquiétantes, des bonnes fantomatiques, celles-là même que l’on a cru deviner dans les grandes armoires de L. et qui l’aidaient à se changer. Elles nous conduisent sur une autre scène, un théâtre caché dans un théâtre, nous entraînent vers une arène obscure, autour d’un espace de jeu très resserré. Déjà une autre pièce commence, d’autres monstres surgissent. Nous nous enfonçons plus avant dans les entrailles du théâtre. Et voilà que les sorcières annoncent le destin de Macbeth... Puis, le chemin se poursuit et nous pénétrons, comme une mise en abîme, dans l’univers des Bonnes de Genet pour assister à une cérémonie macabre. Dans ce spectacle, l’envers du décor est aussi un décor. Il m’a paru nécessaire, dans cette recherche sur la figure du monstre – de nos monstres – de redonner une scène à l’obscène. On dit de Macbeth que c’est une pièce qui porte malheur, il faut donc la jouer sans la monter. La tragédie du passage à l’acte qui condamne à l’infini présent ne doit pas voir le jour. Elle est un secret qu’il faut bien garder. On en trouve d’étranges échos dans la pièce de Genet avec les bonnes et leur désir de meurtre devenu cérémonie.


Macbeth de Shakespeare et Les Bonnes de Jean Genet nouent à mes yeux des correspondances profondes et, tout comme Le Frigo de Copi, dévoilent, chacune à sa manière, nos monstres intimes, nos désirs les plus noirs, nos ressources les plus puissantes. Je cherche à tisser les liens sensibles qui font de ces trois pièces un seul spectacle et un seul parcours vibrant pour les spectateurs : un cheminement dans les recoins inavouables de nos âmes, à la recherche de ce qui est dissimulé, enseveli dans nos coeurs, scellé dans nos frigos intérieurs. Un parcours imprévisible, lui-même monstrueux.

Clément Poirée, metteur en scène

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